Lundi 2 août 2010

http://bouquins.cowblog.fr/images/livres/lesfauxmonnayeurs.jpgRésumé : Qu'un jeune garçon apprenne qu'il n'est pas le fils de son père, qu'il décide de ne pas se présenter à ses examens et de partir au hasard de certaines rencontres : jusque-là, rien que de très commun. Mais qu'il croise la route tordue de faussaires en tout genre, d'enfants qui trafiquent de la fausse monnaie ou de tricheurs ès sentiments, et l'histoire se transforme en une folle épopée où les différents fils se mêlent et s'emmêlent pour mieux finir par démêler tous les mensonges.

Singulier roman que cette croisée de destins et de personnages : il surprend et fascine, tant il ne ressemble à rien de connu tout en conservant une structure parfaitement attendue. Manière de symphonie, où Gide, qui tenait Les Faux-Monnayeurs pour l'un de ses textes les plus aboutis, orchestre les thèmes qui lui sont chers : l'adolescence et ses tourments, les troubles d'identité, mais surtout le mensonge, le faux sous toutes ses facettes, qu'il débusque avec acharnement, pour qu'enfin les masques tombent.

Mon avis : il y a quelques mois j'ai étudié ce livre à la fac, sa structure surtout, alors même si je ne l'avais pas lu, je connaissais déjà pas mal l'histoire. Le style est particulier, différent de ce à quoi je m'attendais à vrai dire, je m'attendais à quelque chose de plus classique, de moins impertinent, j'ai donc été agréablement surprise. Le fait que ce roman mette en scène des adolescents (entre autres)participe sans doute à cette impertinence, on a pas mal de langage familier, d'expressions argotiques qui ne sont aujourd'hui plus guère utilisées et qui par conséquent, assez paradoxalement, passeraient presque pour être des expressions soutenues (exemple : "faire le marlou" pour "faire le malin") : le tout donne une atmosphère spéciale au roman, ces lycéens et écoliers se prennent au sérieux, jouent les pédants, mais ils sont plus amusants qu'exaspérants, car on sent bien que toute cette frime n'est là que pour les soutenir, ils cherchent à se donner de l'importance, alors qu'au fond, ils se cherchent, voire, sont paumés.

Pas vraiment de héros dans ce roman, différentes intrigues s'entremêlent, plusieurs personnages sont d'importance similaires ; au centre tout de même, il y a Bernard, le jeune fugueur, Olivier, son ami, et Edouard, l'oncle d'Olivier, très lié aux deux adolescents, et personnage d'écrivain, qui correspond plutôt à Gide (si on cherche à mettre en évidence ce genre de correspondances) : on a plusieurs extraits de son journal ; et parmi tous les passages que j'ai appréciés et que j'ai eu envie de prendre en note, nombreux sont ceux qui en sont extraits. Le narrateur (externe et qui fait mine de ne pas être omniscient), qui intervient assez souvent, nous fait suivre tour à tout les différents personnages ; à certains moments, il fait même une pause dans son récit pour nous dire ce qu'il pense de l'avancée du roman, d'untel ou untel... un jeu souriant avec le lecteur s'instaure alors.

Les personnages sont nombreux, l'histoire part un peu dans tous les sens, tantôt on s'intéresse de près à tel personnage, pour ensuite quasiment l'oublier par la suite... oh, je sais bien que tout cela est très construit, que rien n'est là par hasard, mais au moment de tourner la dernière page, je me sens déchirée, entre une impression de trop, et de trop peu : l'impression d'avoir suivi quelque chose de très riche, mais d'avoir été stoppée dans mon élan. J'ai trouvée la fin trop abrupte, j'aurais aimé que le roman continue, que vont devenir tous ces personnages ? Je ne suis pas d'accord.

Je reste un peu perplexe, en fait, la densité de ce roman m'a plu, mais finalement je me sens presque dupée. Je pense aussi que je n'ai pas lu ce livre de la façon dont il le méritait, ma lecture n'a pas été assez attentive, elle a été trop traînante, et sans avoir eu de difficulté à suivre, j'ai parfois eu la sensation que je n'avais pas tout en tête, et je me déçois, sur ce coup-là. Même au moment de me demander ce que j'ai finalement vraiment pensé de ce roman, que je suis embrouillée... une lecture agréable, des personnages attachants, un style savoureux, délicieusement ampoulé pour-de-faux, qui sert de nombreux très beaux passages, et je me suis successivement identifiée à plusieurs personnages amoureux ou à la recherche d'attention.... mais j'ai un goût d'inachevé, à relire pour moi dans quelques années, et c'est pourquoi je me félicite de l'avoir acheté au vide-greniers. Je crois bien en attendant que c'est une œuvre qui risque de me marquer. De Gide, j'avais déjà lu La Symphonie pastorale*, et j'ai infiniment préféré les Faux-Monnayeurs. (deux oeuvres vraiment très différentes, mais je dois aussi admettre que la Symphonie pastorale m'a laissé bien peu de souvenirs !)

Extraits : (nombreux, mais je me contiens, j'en ai noté bien plus !)

"Tout ce qui n'est créé que par la seule intelligence est faux."

"Incapable de pénétrer les sentiments secrets de Laura, il prenait pour de la froideur son retrait et ses réticences. Il eût été bien gêné d'y voir clair et c'est ce que Laura comprenait ; de sorte que son amour dédaigné n'employait plus sa force qu'à se cacher et à se taire."

"Je voudrais, tout le long de ma vie, au moindre choc, rendre un son pur, probe, authentique. Presque tous les gens que j'ai connus sonnent faux. Valoir exactement ce qu'on paraît ; ne pas chercher à paraître plus qu'on ne vaut... on veut donner le change, et l'on s'occupe tant de paraître, qu'on finit par ne plus savoir qui l'on est..."

"Il me semble parfois qu'écrire empêche de vivre, et qu'on peut s'exprimer mieux par des actes que par des mots."

"Je crois que c'est le propre de l'amour, de ne pouvoir demeurer le même ; d'être forcé de croître, sous peine de diminuer ; et que c'est là ce qui le distingue de l'amitié."

"Le scepticisme n'a jamais rien donné de bon. On sait de reste où il mène... à la tolérance ! Je tiens les sceptiques pour des gens sans idéal, sans imagination ; pour des sots..."

"Lorsque j'étais plus jeune, je prenais des résolutions, que je m'imaginais vertueuses. Je m'inquiétais moins d'être qui j'étais, que de devenir qui je prétendais être. A présent, peu s'en faut que je ne voie dans l'irrésolution le secret de ne pas vieillir."

Lundi 2 août 2010

http://bouquins.cowblog.fr/images/divers/LogoChallenge1000anslitteraturefce.jpgJe me suis inscrite à un nouveau challenge, qui va me permettre, je l'espère, d'approfondir ma connaissance des classiques ! Il s'agit du Challenge 1000 ans de littérature française, organisé par Bookine ; ce challenge est réalisé à partir d'une série de DVDs intitulée l’histoire personnelle de la littérature française par Jean d’Ormesson et Olivier Barrot... série divisée en 80 chapitres qui retracent l'histoire de la littérature française. Pour chacun de ces chapitres (plusieurs seront couplés à chaque fois pour éviter que ce challenge dure 15 ans ^^), Bookine va nous proposer une fiche synthétique présentant l'époque abordée, et des lectures correspondantes, au rythme d'une lecture "commune" par trimestre ; chaque participant doit choisir un livre (ou plus) d'au moins une des thématiques proposées.

Je mettrai cet article à jour au fur et à mesure pour mettre les liens vers mes billets et faire le récapitulatif des époques rencontrées. Si vous désirez en savoir plus (et nous rejoindre ! :p il est également possible, d'après ce que j'ai compris, de participer de façon ponctuelle), allez voir l'
article présentant le challenge écrit par l'organisatrice elle-même ;)

 
LC1 - 1er week-end d'octobre 2010 : (2 thèmes proposés, cliquez sur les titres pour voir les articles de Bookine contenant une présentation historique et des propositions de lectures plus détaillées !...) :
1) Des chansons de geste à Chrétien de Troyes : propositions de lectures principales :
- La Chanson de Roland : seulement lu des extraits pour la fac (qui sont plutôt mal passés)
Perceval ou le conte du Graal, de Chrétien de Troyes : déjà lu et étudié à la fac en cours d'ancien français, j'en garde un plutôt bon souvenir, mon avis ici ! Du même auteur j'ai aussi lu Yvain ou le chevalier au lion ()...
2) Les premiers romans, les chroniqueurs : propositions de lectures principales :
Le Roman de Renart : lu des extraits pendant mon enfance, j'aimerais assez en lire une version plus complète un jour
- Les Chroniques de Jean Froissart
~> ma lecture : Lancelot ou le chevalier de la charrette de Chrétien de Troyes.

♣ LC2 - 1er week-end de décembre 2010 :
1) François Villon et Clément Marot, deux poètes du XVème siècle : prop. de lectures principales :
- Les Lais ou  Le Testament ou Ballade des pendus de Villon.
- L'adolescence clémentine, de Marot : étudié à la fac, mon billet ici.
2) François Rabelais : lire Gargantua ou Pantagruel
~> ma lecture : j'ai choisi et acheté Pantagruel de Rabelais mais je ne l'ai pas encore lu :$

♣ LC3 - 1er week-end de février 2011 :
1) Michel de Montaigne : déjà essayé de lire une partie des Essais pour la fac, plutôt en vain... je ne choisirai donc pas ce thème.
2) Ronsard et la Pléiade : je pense lire des poèmes de Ronsard, je ne sais pas encore lesquels...

Mardi 3 août 2010

http://bouquins.cowblog.fr/images/livres/concertoalamemoiredunange.jpgQuatrième de couverture : Quel rapport entre une femme qui empoisonne ses maris successifs et un président de la République amoureux ? Quel lien entre un simple marin et un escroc international vendant des bondieuseries usinées en Chine ? Par quel miracle une image de sainte Rita, patronne des causes désespérées, devient-elle le guide mystérieux de leurs existences ? Tous ces héros ont eu la possibilité de se racheter, de préférer la lumière à l'ombre.
A chacun, un jour, la rédemption a été offerte. Certains l'ont reçue, d'autres l'ont refusée, quelques-uns ne se sont aperçus de rien. Quatre histoires liées entre elles. Quatre histoires qui traversent l'ordinaire et l'extraordinaire de toute vie. Quatre histoires qui creusent cette question : sommes-nous libres ou subissons-nous un destin ? Pouvons-nous changer ? Concerto à la mémoire d'un ange est suivi du Journal tenu par Eric-Emmanuel Schmitt durant l'écriture.

Mon avis :
- "L'Empoisonneuse" : une bonne idée de départ, grâce à un personnage ambigü, une femme âgée, meurtrière, qui tombe sous le charme d'un prêtre... personnage que j'ai cependant trouvé peu crédible, et je n'ai pas aimé le fait qu'il "prenne le dessus" par la suite et ai été un peu déçue par la suite des évènements.

- "Le retour" : l'histoire d'un homme qui apprend à prendre conscience de sa famille (je préfère ne pas en dire trop pour ne pas spoiler) pareil... une bonne idée de départ, mais qui s'essouffle vite, malgré le suspense, la fin m'a parue finalement peu surprenante, et même un plutôt mièvre.

- "Concerto à la mémoire d'un ange" : la nouvelle qui donne son nom au recueil... et je ne l'ai pas du tout aimée. Trop longue à démarrer, pas du tout crédible, je n'ai réussi à m'attacher à aucun des deux personnages, le style m'a laissée complètement indifférente, ou bien m'a agacée. En ce qui concerne l'histoire, j'ai la flemme de résumer, mais disons que c'est une sorte de réécriture de l'histoire d'Abel et Caïn.

- "Un Amour à l'Elysée" : un couple de puissants qui se déteste et se menace, une bonne idée de départ, encore une fois, qui laissait présager une fin amusante, perverse, mais encore une fois, la nouvelle s'amollit avant la fin, qui est niaise à souhait. (je dois cependant reconnaître que la lecture de cette nouvelle-ci a été plus distrayante que la lecture de la nouvelle précédente.)


A travers ces nouvelles, l'auteur cherche sans doute à nous amener à une réflexion, à nous poser des questions du type : sommes-nous les maîtres de notre destin ? peut-on changer ? Quelqu'un de mauvais peut-il devenir bon ? (et vice-versa). Mais je ne suis pas convaincue... une grosse déception pour moi, même si je dois admettre que je me doutais un peu, rien qu'à la quatrième de couverture, que ce recueil serait plus du niveau d'Odette Toulemonde* (bien mais sans plus) que de celui de la Rêveuse d'Ostende*...

J'aime beaucoup Schmitt en principe mais il m'a pas mal déçue ces derniers temps, il se peut que j'arrête de lire aveuglément tout ce qu'il écrit. Même si je n'oublie pas qu'il a aussi écrit de bien meilleure qualité (Lorsque j'étais une oeuvre d'art, La Part de l'autre, Le Visiteur, La Nuit de Valogne...) Le style est fluide mais parfois j'ai vraiment l'impression que Schmitt se fait plaisir en nous infligeant des passages où il exagère volontairement, en fait des tonnes, ce type d'écriture peut séduire certaines personnes mais alors moi ça m'a vraiment agacée, pitié !  -_-

Par exemple, cette phrase qui m'a choquée (où il est simplement question d'un type qui transpire) : "Ruisselant des épaules nues jusqu'au creux des reins, le colosse était transformé par la sueur en idole barbare : une aura d'évaporation nimbait son corps verni par les flammes fauves des chaudières." Mais bien sûr ! Je m'appesantis peut-être sur des détails qui n'intéressent que moi, mais franchement, Eric-Emmanuel, tu es capable de tellement mieux ! :(

Samedi 7 août 2010

http://bouquins.cowblog.fr/images/livres/lenfant.jpgCHALLENGE ABC 2010, 15ème livre lu ♦
 
Quatrième de couverture : Fils de professeur de collège et d'une paysanne bornée, Jacques Vingtras, double de Vallès, est dès le plus jeune âge, instruit à l'école du malheur. Sous prétexte de l'aguerrir, on s'ingénie à lui rendre la vie dure, on finit par lui reprocher le pain qu'il mange. Et il brûle du désir de quitter cette maison maudite.

Mon avis : un livre autobiographique qui m'a rappelé Poil de Carotte de Jules Renard et Vipère au poing d'Hervé Bazin, puisque le héros et narrateur est un enfant maltraité et que sa mère n'aime pas... la narration m'a un peu surprise au début, le narrateur évoque successivement ses parents, d'autres personnes de sa famille, des voisins, des lieux... diverses anecdotes s'enchaînent en formant différents chapitre mais cela m'a semblé d'abord plutôt décousu et un peu trop décousu, on a certes un aperçu vivant de la vie du petit Jacques, mais cela reste quand même assez descriptif, je n'ai véritablement accroché qu'après, quand on passe à une narration un peu plus linéaire, quand on suit le personnage dans ses différents déménagements ; on le suit en fait jusqu'à ses 16 ans, ce qui m'a aussi un peu étonnée, sachant que les deux autres livres suivants s'intitulent Le Bachelier et L'Insurgé, je pensais que ce tome-ci ne parlerait que de l'enfance du héros, alors qu'en fait dans ce tome on le connaît également adolescent (même si tout le monde semble encore le considérer comme un enfant), il est question de son baccalauréat et à travers ses premières révoltes, on a les prémices de son engagement politique d'adulte.

Comme dans Poil de Carotte et Vipère au poing, la violence maternelle (et paternelle également, dans l'Enfant le personnage du père n'est en aucun cas un soutien, il apparaît même à plusieurs reprises comme aussi mauvais que la mère) est terrible et elle se cache souvent sous un masque de bonne éducation. Le point fort du discours du jeune héros, c'est certainement son ironie, son ton railleur ; ironie qui semble d'abord dédramatiser la situation, mais qui en même temps, ne fait que dénoncer avec plus de force l'absurdité des comportements parentaux, et leur cruauté. J'ai donc été touchée par ce livre, le style est très agréable, même si j'ai trouvé qu'il y avait quelques longueurs, le début surtout manquait d'entrain à mes yeux (mais pas le tout tout début, l'incipit est formidable) ; et comme c'était surtout le regard d'enfant du héros qui m'intéressait, je ne pense pas que je lirai tout de suite Le Bachelier ni L'Insurgé... peut-être dans quelques années, si je me réconcilie avec les livres où il est question d'engagement politique ! (car il me semble que c'est surtout cette direction-là que la trilogie de Vallès prend, à la fin de l'Enfant)

Extrait : (le début, que j'ai étudié il y a quelques années et que j'aime beaucoup)

Ai-je été nourri par ma mère ? Est-ce une paysanne qui m’a donné son lait ? Je n’en sais rien. Quel que soit le sein que j’ai mordu, je ne me rappelle pas une caresse du temps où j’étais tout petit : je n’ai pas été dorloté, tapoté, baisotté ; j’ai été beaucoup fouetté.
Ma mère dit qu’il ne faut pas gâter les enfants, et elle me fouette tous les matins ; quand elle n’a pas le temps le matin, c’est pour midi, rarement plus tard que quatre heures.
Mademoiselle Balandreau m’y met du suif.
C’est une bonne vieille fille de cinquante ans. Elle demeure au-dessous de nous. D’abord elle était contente : comme elle n’a pas d’horloge, ça lui donnait l’heure. « Vlin ! Vlan ! zon ! zon ! – voilà le petit Chose qu’on fouette ; il est temps de faire mon café au lait. »
Mais un jour que j’avais levé mon pan, parce que ça me cuisait trop, et que je prenais l’air entre deux portes, elle m’a vu ; mon derrière lui a fait pitié.
Elle voulait d’abord le montrer à tout le monde, ameuter les voisins autour ; mais elle a pensé que ce n’était pas le moyen de le sauver, et elle a inventé autre chose.
Lorsqu’elle entend ma mère me dire : « Jacques, je vais te fouetter !
– Madame Vingtras, ne vous donnez pas la peine, je vais faire ça pour vous.
– Oh ! chère demoiselle, vous êtes trop bonne ! »
Mademoiselle Balandreau m’emmène ; mais au lieu de me fouetter, elle frappe dans ses mains ; moi, je crie. Ma mère remercie, le soir, sa remplaçante.
« À votre service, » répond la brave fille, en me glissant un bonbon en cachette.

(pour en lire plus, cliquez ici)

Samedi 7 août 2010

(ma Junie, qui part en camping avec nous)
http://bouquins.cowblog.fr/images/divers/junieavatar.jpg
En vacances du 8 au 25 août environ
,
selon mon accès au net et mon envie de traîner sur l'ordi,
soit mes avis seront publiés au fur et à mesure comme d'habitude
soit la publication de mes avis sera partielle ou anarchique
soit je serai complètement absente et déconnectée.

Je n'ai pas encore fait ma valise et je n'ai pas encore choisi exactement quels bouquins j'emmène
mais je pense en emporter une douzaine, et parmi eux je sais déjà qu'il y aura
Le Comte de Monte-Cristo d'Alexandre Dumas ! (pour la LC du 30 août)

(d'ici demain matin, j'ajouterai peut-être à cet article la liste des livres élus, ou pas)

Portez-vous bien, à bientôt !

MeL


http://bouquins.cowblog.fr/images/divers/vacs.jpg

26 août :

Je suis revenue !
Et j'ai lu 15 livres pendant mes vacances.

J'ai écrit mes avis au fur et à mesure sur Word
et voici donc la liste des articles à venir :
 
- Les Mondes d'Ewilan, tome 1 : La Forêt des Captifs, de Pierre Bottero
- Les Mondes d'Ewilan, tome 2 : LOeil d'Otolep, de Pierre Bottero
- Les Mondes d'Ewilan, tome 3 : Les Tentacules du Mal, de Pierre Bottero
- Le Dieu des Petits Riens, d'Arundhati Roy
- Le Voyage d'Anna Blume, de Paul Auster
- Bleu presque transparent, de Murakami Ryû
- La Femme qui dort, d'Ikezawa Natsuki
- Mitsou, ou comment l'esprit vient aux filles, de Colette
- La Couleur pourpre, d'Alice Walker
- L'Insoutenable Légèreté de l'être, de Milan Kundera
- Fanfan, d'Alexandre Jardin
- La vraie vie de Sebastian Knight, de Vladimir Nabokov
- Clarissa, de Stefan Zweig
- Une forme de vie, d'Amélie Nothomb (cadeau de mon père :D)
- Des souris et des hommes, de John Steinbeck

(et je suis en train de lire Le Comte de Monte-Cristo) => D'ailleurs, la Lecture Commune pour ce livre a été décalée au 10 septembre.

Jeudi 26 août 2010

http://bouquins.cowblog.fr/images/livres/laforetdescaptifs.jpg(lu le 8 août)

Quatrième de couverture / extrait :
"La raison d'Ewilan vacilla. Qui avait révélé son Don à l'Institution ? Qui était au courant qu'elle allait revenir et que son pas sur le côté la conduirait dans le parc à cet instant précis de la journée ? Que savaient les hommes qui l'avaient enlevée de l'Art du Dessin et de Gwendalavir ?"

Mon avis : Mon avis sur La Quête d'Ewilan était mitigé et je m'étais dit que je ne lirais pas les trilogies suivantes et puis finalement, quand j'ai appris qu'un ami de mon frère les possédait je me suis laissée tenter, un peu d'aventures fantastiques pour les vacances, pourquoi pas !
Lu quasiment d’une traite (en voiture sur la route des vacances…), j’ai bien aimé, je dirais, autant que le troisième tome de la trilogie précédente, La Quête d’Ewilan : il faut croire que j’ai décidément fini par m’attacher aux personnages, et le style qui m’avait souvent agacée dans la Quête d’Ewilan m’a plutôt plu dans ce livre-ci (sauf quelques passages un peu mièvres -_-), j’ai trouvé l’écriture moins clichée, les images un peu plus originales ; est-ce que ce livre est mieux écrit ou bien étais-je aujourd’hui dans une meilleure disposition d’esprit ? Je ne sais pas trop…
 
Quasiment la totalité de l’histoire se déroule dans notre monde, ce qui m’a un peu déçue au début, j’aurais aimé retourner à Gwendalavir… mais mon attention a cependant été immédiatement accrochée puisqu’on commence par la description d’une situation désespérée avec la séquestration d’Ewilan par de mystérieux ravisseurs et les tentatives désespérées de Salim pour la sauver… les différents flash-backs habilement entremêlés qui suivent nous permettent de comprendre comment on a pu en arriver là et la révélation de l’identité des ravisseurs est retardée, ce qui renforce le suspense ; une fois qu’elle est connue, l’enjeu sera bien évidemment de les combattre, l’action est donc sans cesse relancée.

La résolution de tous les problèmes se fait un peu trop facilement à mon goût, un rebondissement inespéré surtout m’a semblé un peu facile à inventer pour l’auteur, j’aurais aimé une solution un peu plus subtile, mais bon…. Je ne pense pas que ces différentes aventures me marqueront énormément mais j’ai cependant bien profité de cette lecture très distrayante et c’est donc avec plaisir que je vais me lancer dans le tome 2, l’œil d’Otolep.

Jeudi 26 août 2010

http://bouquins.cowblog.fr/images/livres/loeildotolep.jpg(lu le 9 août)

Quatrième de couverture / extrait : "Le brûleur arrivait sur eux à une vitesse hallucinante. Ellana encocha une flèche, Edwin tira son sabre, Salim son poignard. Le cœur serré par l'angoisse, Ewilan comprit pourtant qu'ils ne pourraient pas arrêter le monstre. Elle se glissa dans l'Imagination. "

Mon avis : Ah, avec ce deuxième tome nous sommes de nouveau dans le monde merveilleux de Gwendalavir, et nous retrouvons bon nombre des personnages rencontrés dans la première trilogie, qui m’avaient manqué.

Je crois bien que j’ai fini par identifier quels sont les traits d’écriture particuliers à Pierre Bottero (j’ai presque envie de les qualifier de « tics ») que je n’aime pas trop. Pour renforcer une idée, donner un ton plus direct, plus péremptoire à son discours, l’auteur ajoute sans arrêt des phrases nominales (le plus souvent) très courtes pour appuyer ce qu’il vient de dire, ou saccader les différentes étapes d’une action de manière emphatique.

Je trouve ça plus redondant et saoulant qu’autre chose, je préfère quand les choses sont dites de façon moins catégoriques, avec plus de nuances, mais bon, je passe outre, et je pense que cette façon de donner plus de poids à différentes déclaration participe à la tonalité épique de certains passages, je pourrais comparer ce style d’écriture à la musique assourdissante qui accompagne souvent les moments forts dans des films. Exemple, dès la deuxième page :
 "La ruelle était étroite, tortueuse, mal éclairée, un véritable coupe-gorge dans lequel la marchombre l’avait précipité quelques minutes plus tôt.
    Volontairement.
Et elle était décidée à ne pas intervenir (...)" (et la phrase continue encore)

Comme dans les tomes précédents, du danger, un certain suspense, des aventures et donc une bonne dose d’action… si la psychologie des personnages secondaires est à peine esquissée, on s’intéresse cette fois-ci d’un peu plus près aux sentiments d’Ewilan et de Salim, et ce n’est pas dommage ! (et je ne sais pas si je l’avais déjà dit en ce qui concerne La Quête d’Ewilan ou pas, en tout cas c’est une impression qui me poursuit, il me semble assez clair que Bottero s’a dû s’inspirer du Seigneur des Anneaux, un peu trop à mon goût, les équivalences entre différents personnages sont si évidentes dans certains cas que quand je pense au personnage d’Edwin par exemple, c’est invariablement l’image d’Aragorn qui me vient à l’esprit). De même dans ce tome quand il est question des conséquences désastreuses d’amours déçus, de cicatrice dangereuses, du comportement de professeurs, de téléportation (le « pas du le côté »), de la nécessité de protéger son esprit contre des attaques qui feraient plier la volonté de notre héroïne…. Il y a plein d’éléments qui me rappellent irrésistiblement l’univers de Harry Potter.

Heureusement, la dimension de l’Imagination et les particularités des différentes aventures et lieux confèrent à l’univers de Bottero une certaine profondeur et une originalité qui permettent d’écarter un minimum de l’esprit du lecteur le souvenir de ces autres œuvres fantastiques. Une fois de plus cependant, je reprocherais à Bottero d’avoir imaginé une solution miraculeuse sortie d’on-ne-sait-où pour sauver une situation infiniment délicate, mais tant pis…
 
 Alors que la fin du tome 1 des Mondes d’Ewilan est relativement calme et positive, la fin du tome 2 donne envie de lire plus rapidement le tome 3 afin de dénouer des problèmes pas encore résolus ! Dans l’ensemble l’intrigue du tome 2 m’a parue plus dense que le tome 1, et plus sombre peut-être : du moins on voit dans ce tome-ci que les problèmes peuvent venir de l’intérieur, ce qui donne une certaine complexité à l’intrigue qui devient dès lors moins manichéenne, et j’ai apprécié l’apparition de Liven dans le rôle de concurrent de Salim… mais je n’en dis pas plus ;)

Citation : "Le ridicule tue moins que la prétention. Et il fait rire."

Jeudi 26 août 2010

http://bouquins.cowblog.fr/images/livres/lestentaculesdumal.jpg(lu le 9 août)

Quatrième de couverture / extrait : "Un frisson d'angoisse parcourut le dos d'Ewilan.
- L'Appel Final mérite des jeux extraordinaires, peuple de Valingaï, pourquivit Baaldoub. Je t'ai donc concocté un programme éblouissant, un programme sanglant, un programme à ta mesure !"

Mon avis : un tome bourré d’action, tout l’enjeu de ce volume étant de résoudre de façon définitive les problèmes insolubles depuis plusieurs tomes, voire même depuis La Quête d’Ewilan… en ce qui concerne le style, voir mes commentaires sur les tomes précédents, je ne suis décidément pas particulièrement fan de l’écriture de Bottero mais je reconnais qu’elle est tout de même assez fluide pour qu’on suive l’intrigue pleine de rebondissements sans gêne et avec plaisir.

Péripéties inattendues et rencontres de personnages extraordinaires sont nombreuses, d’autant plus que ce tome-ci fait cent pages de plus que les deux précédents ; j’ai cependant lu les deux derniers tomes dans la même journée, ce qui montre bien que malgré mes réserves concernant la forme, le tout est assez entraînant ;)

J’ai cependant été un peu déçue de voir que j’avais été assez perspicace pour deviner une révélation fracassante qui couvait depuis le tome d’avant, légère déception compensée par le fait que pour ce dernier tome la résolution de l’action s’est faite de façon moins évidemment heureuse que pour les précédents, et tant mieux.
 
Pour résumer, même si l’univers de Bottero ne compte pas parmi mes préférés, parmi ceux que je vous conseillerais à tout prix, ça a été une découverte finalement très sympathique ; là après avoir lu les trois tomes d’affilée j’avoue que je sature un peu et je pense que ma prochaine lecture sera quelque chose de plus calme… mais tout cela s’est montré bien plus distrayant que je ne l’aurais deviné à la lecture du premier tome de La Quête d’Ewilan !

Jeudi 26 août 2010

http://bouquins.cowblog.fr/images/livres/ledieudespetitsriens.jpg(lu le 11 août)


Quatrième de couverture : Rahel et Estha Kochamma, deux jumeaux de huit ans, vivent en Inde, entourés de leur grand-mère, Mammachi, qui fabrique des confitures trop sucrées, de l'oncle Chacko, un coureur de jupons invétéré, esprit romantique converti au marxisme pour les besoins de son portefeuille, de la grand-tante Baby Kochamma, qui nourrit un amour mystique pour un prêtre irlandais, et de leur mère Ammu, désertée par son mari, qui aime secrètement Velutha, un Intouchable.

Un drame va ébranler leur existence et les séparer. Comment réagir quand, à huit ans, on vous somme de savoir "qui aimer, comment et jusqu'où  ? Comment survivre quand, après un événement affreux dont on a été témoin, on vous demande de trahir la vérité pour l'amour d'une mère ? Un récit envoûtant, plein d'humour et d'émotion, servi par une écriture neuve et poétique, qui recrée le monde de l'enfance - celui de l'imaginaire et de la liberté.

Mon avis : un roman foisonnant qui nous fait découvrir jusque dans leur intimité une foule de personnages, comme si l’auteur connaissait le secret de chacun et nous l’esquissait grâce à de petites touches bien senties, bribes de pensées, de chansons, paroles, images, sensations… on va d’un personnage à un autre, et on voyage dans le temps sans cesse ; ce roman, c’est avant tout l’histoire d’un drame qui a marqué toute une famille indienne, et en priorité, nous suivons le destin de deux jumeaux, Rahel et Estha, et indirectement, celui de leur mère, Ammu.
 
Au début du roman, Rahel adulte retrouve son frère Estha, devenu muet, qu’elle n’a pas vu depuis leur enfance ; et tout l’enjeu du roman sera de comprendre quelle est la tragédie qui a causé leur séparation… on comprend bien vite que cette séparation est liée à la mort de leur cousine, Sophie Mol, mais impossible de deviner ce qui s’est vraiment passé, et alors que s’enchaînent des anecdotes nous illustrant la vie des deux enfants, je me suis demandée à plusieurs reprises où l’auteur voulait en venir, quel était le rapport avec le secret qu’on aimerait voir révélé….
 
Mais maintenant que j’ai fini ce roman extraordinaire, autant du point de vue du style que du point de vue de l’univers qu’il contient (serait-ce le premier roman que je lis qui a lieu en Inde ? Possible…), je comprends l’intérêt de tout cela, car comme Estha le dit, « N’Importe Quoi peut Arriver à N’importe Qui », est c’est pourquoi « Mieux Vaut Se Tenir Prêt ».  C’est le mélange de tous ces Petits Riens qui mènent à la conclusion, Petits Riens majuscules car malgré leur apparente insignifiance, leurs conséquences sont importantes… un beau mélange de hasard, de réactions liées aux différents personnages, leurs goûts, leurs choix, leurs frustrations, leurs peurs, leurs regrets… qui mèneront à d’autres évènements qui paraîtront anodins sur le coup, et pourtant…
 
Un roman non linéaire, flash-backs de différentes époques et temps présent se confondent tant que je m’y suis parfois un peu perdue, et même parfois ennuyée parce que j’avais l’impression de ne plus comprendre… et pourtant, malgré ce désordre apparent on se dirige toujours, lentement mais sûrement, vers le jour qui bouleversera tout, somme logique (si tant est que la Vie est logique…) de tout le reste. Les trois personnages qui me resteront le plus en tête sont bien sûr Ammu, femme qui se sacrifie pour ses enfants, pour sa famille, broyée par une société injuste envers les femmes censées être soumises et dans la norme, une société qui impose, comme cela est répété plusieurs fois, des « Lois de l’Amour. Qui disaient qui devait être aimé et comment. Et jusqu’à quel point. » Et ses enfants donc, les faux jumeaux, Rahel et Estha, qui longtemps ne sont qu’un « Nous » avant d’être absurdement séparés…
 
Une lecture vibrante, surtout vers la fin pour moi, car c’est là que toutes les expressions récurrentes et parfois un peu incompréhensibles qui rythmaient tout le roman ont pris leur sens à mes yeux, que j’ai compris à quel point elles symbolisaient de façon poétique et forte ce qui comptait pour chaque personnage. L’histoire m’a pas mal rappelé Ne tirez pas sur l’oiseau moqueur, car c’est une histoire d’enfance, d’amour concernant un « intouchable », et d’injustices, mais le style, s’il n’est pas forcément toujours très aisé, est unique.

Jeudi 26 août 2010

http://bouquins.cowblog.fr/images/livres/levoyagedannablume.jpg(lu le 12 août)
COUP DE CŒUR !

Quatrième de couverture : D'une ville qui semble sur le point de disparaître, Anna Blume écrit une lettre dont on ne sait si elle trouvera jamais son destinataire. Cet ailleurs presque indéfini, ce pays des dernières choses (c'est, littéralement traduit, le titre de l'édition anglaise) a une force symbolique d'autant plus efficace qu'elle défie en nous un passé de terreurs et d'apocalypses en même temps qu'elle renouvelle les interrogations auxquelles nous oblige parfois notre perverse relation avec le langage. Mais la force et le talent de Paul Auster, révélé en France par sa fameuse Trilogie new-yorkaise, c'est de faire sentir le poids de ces oppressions sans jamais s'éloigner d'une " aventure " infiniment romanesque par laquelle on reste fasciné du commencement à la fin.

Mon avis : eh bien, j’adore ! Même si je n’ai lu que pour le moment que deux œuvres de Paul Auster – celle-ci et La Nuit de l’Oracle -, j’ai bien envie d’introduire cet auteur dans la liste de mes Ecrivains Préférés. Ce livre-ci m’a autant captivée que la Nuit de l’Oracle, même si ces deux œuvres sont très différentes : dans la Nuit de l’Oracle, on assiste à la « renaissance » d’un homme d’un certain âge qui revient à la vie après un grave accident ; dans Le Voyage d’Anna Blume au contraire, on assiste à la lente « déchéance » (mais est-ce le mot juste ? Anna apprend tout de même bien des choses tout au long de son parcours…) d’une jeune fille qui part à la recherche de son frère disparu dans une ville mystérieuse et effrayante.

On a peu d’informations objectives sur le monde dans lequel se déroule cette histoire ; comme la quatrième de couverture l’indique, il s’agit d’une lettre, mais aucun indice ne permet d’identifier de façon très précise le destinataire ; ce flou, associé à l’utilisation régulière du pronom de la deuxième personne du singulier (un peu comme dans Un homme qui dort, mon livre fétiche…), fait qu’on se sent encore plus concerné par tout cela, un lien se tisse entre l’héroïne et nous, je me suis sentie proche d’elle, et d’autant plus impuissante…
 
Ce qui importe, ce n’est pas tant la nature des différentes aventures que l’héroïne va nous raconter, que l’ambiance de cette ville terrible, et les comportements de ses habitants. On a une ambiance apocalyptique qui m’a pas mal fait penser à La Route, de Cormac McCarthy ; de même que le début, qui est assez étrange (on a du mal à distinguer si la ville qui commence à être décrite n’est pas un songe, une chimère sortie de l’esprit de l’héroïne, tout semble étrange et fantastique), nous montre un monde de misère anarchique, cependant régi par des règles impitoyables, une vraie jungle, cet ordre paradoxal, les coutumes désordonnées de ce résidu de civilisation m’ont fait penser au monde fictif créé par Georges Perec (encore lui... <3) dans W ou le Souvenir d’enfance.
 
Chacun doit se battre pour survivre, l’environnement est instable, profondément violent et dangereux, les instincts humains les plus mauvais s’y déchaînent, chacun est poussé dans ses derniers retranchements, et ce qui m’a passionnée, c’est d’imaginer (enfin en l’occurrence, d’admirer les fruits de l’imagination de Paul Auster) dans quelle mesure il est possible de rester « humain » dans ces conditions, et qu’est-ce qui caractérise notre humanité alors, l’amitié et l’amour peuvent-ils subsister quand l’égoïsme primitif est nécessaire pour avoir une chance de survivre ? Quels sont les différents moyens de réagir à une telle précarité, de s’en sortir, que devient notre vie quand on n’a plus rien, jusqu’où va notre instinct de survie ?
 
 
 A aucun moment notre héroïne (et narratrice) ne semble sombrer dans la folie, elle reste assez humaine à nos yeux, et lucide, son discours est clair et agréable à suivre, on sent bien qu’elle tient vraiment à faire comprendre à son interlocuteur ce qu’elle nous raconte, à nous faire sentir comment une mentalité très civilisée peut évoluer, elle incarne à la fois la mémoire vivante du monde tel que nous le connaissons, et le personnage qui doit s’intégrer de force dans ce nouveau monde sauvage : les rencontres qu’elle y fait sont variées et nous permettent de nous trouver face à un large panel des situations possibles.

L’impression de flou et d’inconstance qui domine tout le livre donne paradoxalement une impression de réalisme, on ignore comment on est arrivé là, aucune solution n’est trouvée, aucune réponse certaine n’est donnée aux questions qui se posent, l’héroïne flotte entre lutte, désespoir et indifférence, tout en étant tournée vers l’extérieur elle n’échappe pas à l’exercice d’introspection que revêt tout acte d’écriture autobiographique (je vous rappelle encore que la totalité du livre constitue une lettre où elle raconte ce qui lui est arrivé), si bien qu’on s’identifie facilement à elle, ce roman est universel, et toutes ses réactions m’ont paru tout à fait plausibles.
 
Enfin j’ai trouvé l’ensemble du texte très beau, si beau que j’ai souvent relu des passages, que j’ai eu envie de les noter ou de les lire à voix haute, ce cocktail de misère extrême dans tous les sens du terme et de pensées humaines envers et contre tout m’a semblé extrêmement poétique.

Citations :
"Tout ce que tu vois a la capacité de te blesser, de te diminuer, comme si par le seul acte de voir une chose tu étais dépouillé d'une partie de toi-même."

"Chaque fois que tu crois connaître la réponse à une question, tu découvres que la question n'a pas de sens."

Jeudi 26 août 2010

http://raison-et-sentiments.cowblog.fr/images/Anciens/9782877302968.jpg(lu le 13 août)
/!\ Pour lecteurs avertis /!\

Quatrième de couverture : Bleu presque transparent relate, en une succession de courts chapitres, quelques journées dans la vie d'un groupe d'adolescents. Journées ou plutôt nuits vides d'espoir d'une " génération perdue " et désillusionnée qui s'abîme dans la destruction. Sexe, drogue, musique, violence... le tableau serait d'une banale désespérance s'il n'y avait ce mélange de distance quasi clinique et d'infinie générosité dans le regard porté sur les personnages. Dans Tôkyô oppressante et triste, Ryû, Kei, Okinawa payent, dans leur corps qu'ils ruinent avec constance, l'absence d'âme d'une société. Et leur déchéance possède la couleur du bleu presque transparent de la pureté.
 
Mon avis : Un livre qui m’a été offert par Matilda, qui ne l’avait pas aimé (son avis m’avait cependant donné envie de le lire).

Comme prévu, c’est trash à souhait (encore que, je m’attendais presque à pire...). D’abord, ça semble sans queue ni tête, une succession de soirées orgiaques où les personnages vont de plus en plus loin… mais ce qui m’a donné envie de poursuivre ma lecture (que je n’aurais de toute façon pas arrêté, une telle débauche de violence a quelque chose de fascinant, je trouve – serais-je perverse ?), c’est le style, le ton de Ryû, narrateur et héros (et auteur, puisque tout cela semble autobiographique, si on en croit la lettre de la fin adressée à Lili, un des personnages – c’est elle d’ailleurs, sur la photo de la couverture).
 
Il semble blasé, comme s’il s’intéressait plus aux insectes grouillants autour de lui, à la nourriture pourrissant à ses côtés, à ce qui se passe par la fenêtre, qu’aux actes sexuels nombreux, variés et extrêmes auxquels il participe pourtant, comme s’il était un observateur machinalement actif… leurs soirées semblent cruelles, dénuées de sentiments, jeux fous empreints de douleur voire de mort ; à de multiples reprises Ryû nous informe qu’il a la nausée ; l’atmosphère glauque entraîne des descriptions sordides mais porteuses d’images inattendues, qui en deviennent poétiques, j’ai beaucoup aimé par exemple l’image des « cornichons pareils à des doigts de cadavre couverts de verrues ».
 
L’amour et l’amitié semblent impossibles dans de telles conditions, et pourtant, dans des moments de calme et de tête-a-tête, certains personnages se livrent parfois à des confidences intimes qui nous les font voir (ou pas, mais quelquefois si) sous un autre jour, plus humain, ils deviennent alors plus touchants, même si la scène d’orgie qui suit vient nous dégoûter à nouveau et anéantir le début de compassion qu’on a eu pour eux…

Cependant à la fin, c’est la compassion qui a dominé pour moi, les « confessions » des personnages pendant lesquelles ils tentent d’expliquer leur mal-être se font plus nombreuses, on a l’impression que tout déraille, qu’ils n’en peuvent plus, qu’ils ne peuvent aller plus loin, qu’ils partent dans des directions différentes ; à la toute fin la lettre à Lili que j’ai déjà évoquée, lettre aux accents personnels, m’a parue être une conclusion émouvante, qui donne à tout l’ensemble un tour peut-être un peu plus humain (si j’ai fait tant d’efforts pour, à l’instar du narrateur, ne pas juger les personnages, c’est peut-être aussi parce que j’avais lu cette lettre de la fin avant de lire tout le reste ?)
 
Un ouvrage étrange, qui peut se révéler fort pour peu qu’on arrive à entrer suffisamment dedans sans être dégoûté (ce qui, je le conçois, n’a rien d’évident), à ne pas lire n’importe quand, et donc à ne pas mettre dans toutes les mains, mais j’ai aimé cette lecture, qui me donne encore plus envie de lire d’autres œuvres de cet auteur (et en premier lieu, les Bébés de la consigne automatique, qui est dans ma LAL depuis plusieurs mois).

Jeudi 26 août 2010

http://bouquins.cowblog.fr/images/livres/lafemmequidort.jpg(lu le 14 août)

Quatrième de couverture : Les histoires d'Ikezawa Natsuki nous entraînent, du Brésil à l'île d'Okinawa, dans des voyages amoureux, tour à tour réalistes et oniriques. Elles nous emportent dans des contrées, à mi-chemin du réel et du songe, où des forces anciennes sont encore à l'œuvre et influent sur les vivants. Elles nous parlent de la mystérieuse sémantique des rêves, de la fraîcheur vivace des sentiments surgie intacte de l'épaisseur du temps.

Mon avis :
un livre que j’ai eu envie de lire pour plusieurs raisons : c’est un recueil de nouvelles (j’aime !), que Matilda a lu et aimé, d’un auteur japonais (ça change donc de mes lectures habituelles), et surtout (attention, argument le plus important à mes yeux, mais qui est aussi le plus bidon), le titre, La femme qui dort, m’a fait penser à mon livre fétiche, Un homme qui dort, de Georges Perec (je pense que si je tombe sur des livres intitulés le chat qui dort, le vieillard qui dort… je me sentirais peut-être obligée de les lire aussi ^^)
 
Un recueil de trois nouvelles, chacune faisait un peu plus de trente pages, et le point commun de ces nouvelles, c’est sans doute leur douceur, ce sont des histoires qui nous font voyager, rêver, sans qu’on passe par des sentiments de peur ou de tristesse ; on dit souvent que « les gens heureux n’ont pas d’histoires », ces nouvelles nous prouvent le contraire, elles sont toutes profondément positives !
 
La nouvelle éponyme, qui est la dernière du recueil, est celle que j’ai le moins aimé ; cette « Femme qui dort » et vit pendant plusieurs jours une sorte de rêve mystique m’a moins touchée que les personnages des autres nouvelles, son aventure intérieure est une série de rites spirituels plutôt répétitifs, et l’accumulations de termes japonais m’a un peu perdue en route ; ces moments de veille m’ont aussi un peu déçue, j’aurais aimé qu’une réelle discussion s’initie avec son mari mais ce n’est pas le cas, et même s’il n’y aucune dispute, aucun évènement sombre à proprement parler, c’est cette nouvelle-ci qui m’a semblée la moins joyeuse, la plus mélancolique peut-être.
 
Je préfère donc garder en mémoire les deux autres nouvelles du recueil ; la deuxième, intitulée « Mieux encore que les fleurs » est une aventure sentimentale entre deux personnages fort différents, chacun timide à sa façon, et qui aurait pu être banale (encore que, j’ai trouvé que les deux personnages avaient un air de candeur, d’innocence dans leur relation charnelle, qui est très humaine, réaliste et émouvante), si elle n’était mêlé à une histoire plus fantastique à la fin ; mais ma nouvelle favorite reste la première, « les origines de N’kunre », qui m’a séduite par l’impression de sérénité qu’elle dégage… je l’ai lue juste avant de m’endormir, et ce conte utopique qui nous fait croire à une incantation capable de calmer les esprits des hommes a bercé mon endormissement d’une façon délicieuse.

Jeudi 26 août 2010

http://bouquins.cowblog.fr/images/livres/mitsou.jpg(lu le 14 août)

Résumé :
Un mois de mai de la guerre. Mitsou, petite danseuse de l'Empyrée-Montmartre, s'apprête à entrer en scène quand surgit dans sa loge son amie Petite-Chose, accompagnée de deux jeunes sous-lieutenants, un kaki et un bleu horizon. Mitsou se montre froide et réservée. Mais elle est bien jolie et le Lieutenant Bleu, avant de retourner au front, lui adresse une lettre. Une correspondance s'établit. Malgré les fautes d'orthographe, des tournures quelque peu populaires, les lettres de Mitsou enchantent le jeune homme; elle s'y révèle d'une grande pureté de cœur. Chacune des lettres les rapproche et ils finissent par oublier tout ce qui les sépare, jusqu'au jour où le Lieutenant Bleu arrive en permission...

Mon avis : un court roman qui commence comme une amourette frivole ; au début le style est très théâtral, ce sont surtout les répliques pleines d’espièglerie (mais qui restent toujours superficielles) de Mitsou et son amie Petite-Chose qui sont amusantes – et savoureuses, puisque c’est une façon de parler aujourd’hui désuète, même si cela reste assez proche de nous ; imaginer une héroïne un peu sotte, dont l’auteur n’hésite pas à se moquer gentiment, est aussi une situation assez originale, le lecteur ne sait pas bien quel parti prendre : cette petite Mitsou est-elle aussi simple qu’elle le paraît, ou bien cache-t-elle un trésor enfoui  ? (le titre peut également nous orienter dans cette direction) Pourquoi faire de cette fille légère et banale une héroïne, est-elle censée représenter son milieu, ou bien est-elle au contraire exceptionnelle ? Voilà le genre de questions que j’ai pu me poser.
 
J’aurais aimé qu’on en sache un peu plus sur le Lieutenant Bleu – même si c'est vrai que les nombreux commentaires sur son attitude qui nous informent sur son état d’esprit lors de sa deuxième rencontre avec Mitsou nous permettent de bien le cerner – mais il est assez clair que c’est Mitsou le véritable sujet du roman, Mitsou, et surtout, la relation qu’elle tisse avec le Lieutenant Bleu, relation ambigüe puisque les sentiments qu’il éprouve à son égard ne sont jamais très clairs ; les différentes lettres qu’ils s’échangent avant de se revoir sont de petits bijoux, on voit de quelle façon leurs sentiments évoluent et s’expriment, tout en gardant un style réaliste et propre à chaque personnage (les lettres de Mitsou sont parsemées de fautes d’orthographe...)
 
Leurs retrouvailles, dont Mitsou comme le lecteur attendent beaucoup, ne se passent pas tout à fait comme prévu, ce qui donne de l’originalité à l’intrigue, mais ce qui la rend vraiment hors du commun et en fait tout le sel, à mon avis, c’est la dernière lettre de Mitsou, qui nous fait connaître sa réaction et nous fait penser qu’elle est peut-être plus fine, et meilleure qu’on n’avait pu le penser jusque-là en suivant nos préjugés. La fin est cependant très abrupte, je n’avais pas surveillé le nombre de pages qu’il me restait et sur le coup j’ai été très frustrée, mais en y réfléchissant cette fin ne me paraît pas non plus dénuée de sens, elle laisse au lecteur le soin de faire plusieurs interprétations, qui peuvent s’opposer mais se tiennent toutes ! Une jolie découverte donc, le ton ne semble pas sérieux mais finalement c'est assez émouvant !
 
Mon extrait préféré : « Ma chère Mitsou, j’ai envie de vous voir. J’ai envie de vous voir. Que vous dirais-je d’autre ? J’ai envie de vous voir. Je me sens doux, faible, vague, penché vers quelque chose de moelleux, de profond, d’indistinct qui m’attire. Je me sens à la fois heureux et privé de tout. C’est une anxiété, et en même temps une paresse, l’une comme l’autre pleine de charmes. Un état d’adolescence… »

Jeudi 26 août 2010

http://bouquins.cowblog.fr/images/livres/lacouleurpourpre.jpg(lu le 15 août)

Quatrième de couverture : " Toute ma vie je m'ai moquée de ce que les gens pensaient de moi. Mais dans mon coeur, c'était important Dieu qu'est-ce qu'il pensait. Et voilà maintenant j'ai compris, il pense pas, il se prélasse là-haut, assis sur son trône à faire la sourde oreille." Célie est née sous de tristes auspices. Hier régulièrement violée par son père et aujourd'hui négligée par son mari, elle ne connaît des hommes que leurs pires travers. L'amour, pour elle, c'est d'abord Shug, une merveilleuse chanteuse de blues qui saura l'extraire de sa pauvre vie. C'est aussi Nettie, sa soeur, missionnaire en Afrique, avec laquelle elle correspond sans relâche. L'amour, c'est encore le bon Dieu, à qui elle s'adresse parfois, même si elle a l'impression qu'il la laisse un peu tomber.

Mon avis : un livre que j’ai envie de lire depuis que j’ai vu un extrait du film au lycée (ça commence dont à faire un moment), et qui se présente comme un roman épistolaire bien particulier ; d’abord les lettres de Celie sont adressées à Dieu (le titre de la première édition française était d’ailleurs Cher Bon Dieu), puis elle les adresse à sa sœur, Nettie, et vice-versa, mais toutes ces lettres ne parviennent jamais à destination (ou alors, bien des années après leur écriture) ; il s’agit donc plus de lettres-monologues où Celie - la majeure partie des lettres sont d’elle, la première lettre de Nettie n’apparaît qu’à la page 100 (sur 250) – raconte ce qui lui arrive, le tout m’a fait penser à un journal intime tenu irrégulièrement.

L’absence de dates est ce que je reprocherais en premier à ce roman : dans la première lettre Celie a 14 ans, quelques pages après, elle en a vingt, et ce n’est qu’au détour d’une phrase qu’on l’apprend… un peu avant la fin, l’une des sœurs (je crois que c’est Nettie) parle de ses cheveux blancs et on apprend qu’une trentaine d’années s’est écoulée, et même si on sent que le temps passe puisqu’il est souvent question d’enfants qui grandissent, je ne m’étais pas vraiment rendu compte du nombre d’années que le tout représentait ! Si les lettres avaient été datées, je me serais peut-être repérée plus facilement.
 
Je n’ai pas non plus aimé le début, que j’ai trouvé trop pathétique et en même temps trop froid : dès la deuxième page, Celie nous informe que sa mère va mourir, que son père la viole fréquemment, qu’il lui a fait deux enfants qu’il lui a aussitôt enlevés, sûrement pour les tuer. Evènements qui font déjà bien froid dans le dos, et qui ne sont assortis d’aucun commentaire, d’aucune plainte, ils sont énoncés de façon rapide et détachée, c’est à se demander d’abord si Celie n’est pas complètement insensible voire attardée ! (j’exagère un peu et la suite nous montre le contraire mais en lisant les toutes premières pages c’est vraiment ce que j’ai pensé tant j’ai senti un décalage entre les faits atroces et la façon de les dire !)
 
Pendant un bon bout de temps encore, Celie (qui est la véritable héroïne du roman) m’a agacée ; les malheurs s’enchaînent pour elle, mais elle ne cherche pas à se battre, elle courbe l’échine et ne semble pas avoir une meilleure opinion d’elle-même que ses bourreaux ; ce n’est vraiment qu’avec l’arrivée de Shug, une femme charismatique au caractère bien trempé et indépendant (tout le contraire de Celie a priori) que la vie, et surtout le cœur de Celie va être bouleversé, et que mon avis plutôt négatif a changé. Au fil des années, les personnages prennent de l’épaisseur, deviennent moins manichéens (pendant longtemps la plupart des femmes sont soumises et la plupart des hommes, brutaux), et suivre leur évolution et leurs aventures m’a beaucoup plu, le roman s’est révélé finalement bien plus prenant que les premières pages ne le laissaient présager !
 
Les lettres de Nettie, qui nous racontent son périple de missionnaire en Afrique, sont passionnantes, elles nous font vivre auprès de ceux qui sont alors considérés comme des "indigènes" ; des relations se nouent, et à travers ce roman très humain, les personnages se posent finalement pas mal de questions d’importance à propos des relations entre les Blancs et les Noirs, les « civilisés » et les « indigènes », les hommes et les femmes, et tous les êtres humains en général avec la nature et la spiritualité ; réflexions nouées à propos de situations concrètes, dans un style simple et très oral (les lettres de Celie surtout garderont toujours un ton assez innocent, lié au tempérament particulier de Celie, et à son manque d’instruction et de connaissance du monde extérieur, même si les choses progresseront au cours du roman).
 
Une lecture positive donc, j’ai mis du temps à vraiment m’attacher à l’héroïne, mais j’ai adoré le personnage de Shug, certaines situations, et la sensation globable d’évolution que nous donne l’ensemble du roman.

Extrait :
"Maintenant que mes yeux sont ouverts, je me sens toute bête. Si je compare la méchanceté de Mr... à côté de n'importe quelle petite plante du jardin, elle paraît plus si importante. Mais pas rien du tout non plus. Shug a raison quand elle dit qu'y faut d'abord chasser l'homme de devant son oeil pour y voir plus clair.
  L'homme il se met partout et il pourrit tout. Il est sur ta boîte de céréales, dans ta tête, sur toutes les radios. Il veut te faire croire qu'y a que lui partout. Et quand tu le crois, alors tu penses que Dieu c'est lui. Mais c'est pas vrai. Donc quand t'as envie de prier et que l'homme se met devant toi comme si c'était lui, envoie-le balader. Pense aux petites fleurs, au vent, à l'eau, à un gros caillou."

Jeudi 26 août 2010

http://bouquins.cowblog.fr/images/livres/linsoutenablelegeretedeletre.jpg(lu le 16 août)

COUP DE FOUDRE

Quatrième de couverture / extrait : Qu'est-il resté des agonisants du Cambodge ? Une grande photo de la star américaine tenant dans ses bras un enfant jaune.
Qu'est-il resté de Tomas ? Une inscription : il voulait le Royaume de Dieu sur la terre. Qu'est-il resté de Beethoven ? Un homme morose à l'invraisemblable crinière, qui prononce d'une voix sombre : Es muss sein ! " Qu'est-il resté de Franz ? Une inscription : Après un long égarement, le retour. Et ainsi de suite, et ainsi de suite. Avant d'être oubliés, nous serons changés en kitsch. Le kitsch, c'est la station de correspondance entre l'être et l'oubli.
 
Mon avis : il y aurait tant à dire… la première fois que j’ai vu ce livre, c’était il y a six ans, dans une librairie montargoise. La beauté du titre m’avait frappée (comme vous le savez peut-être, je suis très sensible à ces choses-là), la beauté du nom de l’auteur également. La quatrième de couverture ne me tentait pas (je l’ai d’ailleurs aussitôt oubliée), mais j’ai été immédiatement fascinée, attirée et en même temps impressionnée, intimidée par ce livre, que je n’ai donc pas acheté mais que je m’étais promis de lire plus tard. C’est, je crois bien, le seul livre que j’ai adoré avant de le lire ; ça semble peut-être idiot, mais c’était mon intime conviction.

Quelques années plus tard, j’ai commencé à lire un blog (que je suis toujours) écrit par une demoiselle de talent, un blog que je commente irrégulièrement et toujours anonymement, et dont je garde jalousement l’adresse ; et la propriétaire de ce blog a écrit à plusieurs reprises qu’elle adorait Kundera, et je ne saurai pas expliquer pourquoi, mais cela a fortement renforcé l’impression que je l’adorerais moi aussi. Pour mes vingt ans, je me suis offert l’Insoutenable Légèreté de l’Etre, et je me suis promis que je le lirai avant mes vingt et un ans ; mais ensuite, plus les mois passaient, moins j’osais l’ouvrir, tellement j’avais peur d’être déçue. J’ai donc encore attendu 8 mois et demi avant de l’ouvrir, et hier, je l’ai presque entièrement englouti (je l’ai fini ce matin).
 
J’ai encore la sensation que je n’ai pas assez de recul pour vous parler de ce livre. Je ne sais pas si j’en aurai un jour assez. (curieux hein, comme je rechigne à commenter de la façon habituelle les livres qui m’ont le plus touchée). Mais je pense pouvoir dire aujourd’hui sans me tromper que ma rencontre avec Milan Kundera ne fait que commencer, et que l’Insoutenable Légèreté de l’Être est le troisième véritable coup de foudre littéraire de ma vie. (les deux premiers sont : Le Portrait de Dorian Gray, d’Oscar Wilde, lu l’été de mes quatorze ans ; Un homme qui dort, de George Perec, lu quand j’avais 18 ans. A 16 ans, j’aurais peut-être ajouté La Hors-Venue, de Marie Brantôme, mais je n’ai pas réussi à le relire de façon satisfaisante des années après et c’est donc un coup de cœur que j’aurais tendance à disqualifier aujourd’hui)
 
Comment vous définir ce qu’est à mes yeux un coup de foudre littéraire ? Je dirais que c’est un livre que je suis sûre de relire, que je dois absolument avoir dans ma bibliothèque (si jamais je l’ai emprunté pour le lire, je l’achète rapidement), et même pourquoi pas, en plusieurs éditions, pour l’avoir toujours sous la main et ne pas risquer de le perdre ; un livre qui me procure une jouissance non éphémère, dont la simple évocation me réconforte ; un livre que je lis lentement pour bien le savourer ; j’interromps ma lecture pour relire certains passages, je note des pages que j’ai envie de relire et relire, de connaître par cœur (une quarantaine de passages de l’Insoutenable légèreté de l’Être m’ont ainsi paru géniaux)
 
Pour le moment, je dirais juste que j’ai été touchée par tous les personnages ; Tomas l’indécis séducteur, Tereza l’amoureuse jalouse aux cauchemars effrayants, Sabina la femme légère, Franz le rêveur... C’est un livre qui mêle des personnages humains en proie à des histoires d’amour tout sauf niaises, qui façonneront grandement leur vie ; des personnages qui se posent des questions ; des réflexions sur la liberté, Dieu (sujet qui parfois me barbe prodigieusement mais que j’ai trouvé captivant ici), l’existence, le kitsch (le kitsch, un concept qui m’était assez étranger et qui m’a énormément intéressée, je n’en ai pas fini avec lui !), la vie et l’expérience qu’elle peut nous apporter, les possibles inaccessibles, le roman (j’ai eu du mal à me remettre du formidable art poétique de la page 318), les symboles qu’on choisit pour rendre notre vie romanesque, la place de l’Histoire dans nos vie, la guerre, les animaux, les rêves… sujets variés, tous liés de façon originale, je continuerai longtemps à puiser dans ce livre (puisqu’il est une de mes bibles désormais).

Kundera a réussi à rendre concrètes et compréhensibles des choses abstraites qui m’étaient inconnues (dans la première phrase par exemple il parle du concept nietzschéen de l’éternel retour et au début je me demandais bien où il voulait en venir…) C’est un livre universel, assez vaste pour être général, mais qui nous donne aussi une vision particulière de notre monde, en évoquant notamment la Tchécoslovaquie sous l’emprise de l’Union Soviétique (évènements historiques que je connais assez peu, et seulement grâce à des cours d’Histoire, et j’ai maintenant envie d’en savoir plus).

Avis très très subjectif et qui mériterait d'être complété par plusieurs relectures, mais je pense que vous avez compris à quel point je vous le conseille !

Quelques citations :
"Qui cherche l'infini n'a qu'à fermer les yeux."

"Avoir le vertige c'est être ivre de sa propre faiblesse."

"Tomas se dit : Lier l'amour à la sexualité, c'est l'une des idées les plus bizarres du Créateur.
Et il se dit encore ceci : Le seul moyen de sauver l'amour de la bêtise de la sexualité ce serait de régler autrement l'horloge dans notre tête et d'être excité à la vue d'une hirondelle."

"L'amour physique est impensable sans violence."

"Le rêve est la preuve qu'imaginer, rêver ce qui n'a pas été, est l'un des plus profonds besoins de l'homme."

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"Je n'ai jamais eu de chagrin qu'une heure de lecture n'ait dissipé.", Montesquieu

Un livre au hasard

Il ne se passait rien...
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