Quatrième de couverture : Minimalistes, fantastiques, provocateurs, ces quarante-huit « textes-clips » d’Etgar Keret sont autant de plongées dans un univers littéraire inédit. Ecrits en état d’urgence, le souffle coupé, ils se jouent de la vraisemblance, font exploser les représentations attendues, brouillent les pistes, et leur brièveté redoutable ne les rend que plus pates à embrasser l’inquiétante absurdité d’un monde à la dérive. L’écrivain israélien le plus insolent et le plus salutaire de sa génération a inventé en littérature une écriture fort singulière : celle de la violence instantannée, quotidienne, qu’accompagne toujours son antidote – une poignée de valeurs sans lesquelles notre planète finira par tourner sans nous.
Mon avis : il y a quelques mois, j’ai vu et adoré Le sens de la vie pour 9,99$, film d’animation en stop-motion réalisé par Tatia Rosenthal et qui s’inspire de plusieurs nouvelles tirées de ce recueil-ci, et d’un autre recueil intitulé Pipelines. J’ai été contente de retrouver dans ce recueil certains passages qui m’avaient ravie dans le film, et plus globalement, ce recueil et le film partagent le même esprit : la vision du monde que nous propose l’auteur est originale, empreinte de fantastique mais triste à la fois, tantôt charmante, mais le plus souvent désespérée, les idées des enfants cohabitent difficilement avec cel, les hommes sont victimes de compagnes finalement décevantes, incompréhensibles et cruelles, toujours insatisfaites… un monde étrange, plaisant à lire, les nouvelles s’enchaînent souvent de façon cohérente (un thème, un objet abordé à la fin d’une nouvelle est parfois l’élément déclencheur de la suivante) ; si bien que le tout forme un univers possible.
Voici la nouvelle éponyme, qui clôt le recueil :
« Quand on a une crise d’asthme, on manque d’air. Quand on manque d’air, on a du mal à parler. La phrase est bloquée par la quantité d’air qu’on peut sortir des poumons. C’est bien peu, environ trois à six mots. Çe n’est pas comme les gens sains qui sortent tous les mots accumulés dans leur tête, comme on sortirait des poubelles. Pendant une crise, quand quelqu’un vous dit « Je t’aime » ou « Je t’aime beaucoup », il y a une différence. Celle d’un mot. Et un mot c’est beaucoup, parce que ça peut être « s’asseoir », « Ventoline » ou même « ambulance ».