Vendredi 5 février 2010

http://bouquins.cowblog.fr/images/livres/lepeupledutapis2.jpgQuatrième de couverture : Sur tout le Tapis règne la paix de l'Empire Dumii. Aux marges de la civilisation, la tribu des Munrungues coule sous les poils une existence paisible. Mais un jour un terrible cataclysme frappe à proximité du village. Une ville Dumiie est broyée par l'ancien monstre des légendes : le grand Découdre est de retour!
Dans son sillage, des créatures féroces parachèvent son oeuvre de destruction. Cernés, les Munrungues s'engagent dans un périple à travers les poils, sous la conduite des frères Orkson.
Un voyage qui les conduit à la découverte des merveilles de leur monde et changera pour toujours la vie des Fils de la poussière...

Mon avis : alors que ce livre fait 188 pages seulement, j'ai mis énormément de temps à le lire. je n'ai pas vraiment réussi à entrer dans l'histoire, je ne sais pas trop pourquoi.... je ne me suis pas vraiment ennuyée pourtant, mais je ne me suis pas senti proche des personnages, je crois que j'aurais aimé plus de descriptions, cela m'aurait peut-être permis de mieux me représenter cet univers ? Je pense cependant que c'est un bon livre, qui réunit pas mal d'ingrédients positifs.

Le Tapis a bien des points communs avec notre monde, cette métaphore est une bonne idée, à travers cette histoire on a une critique ludique de la guerre, de la violence, de divers régimes politiques. Il y a une bonne dose d'humour aussi, le côté héroïque des personnages est détourné, certains sont lâches ou ont une intelligence limitée, cela change des héros ordinaires (même si ma connaissance des héros ordinaires de fantasy est assez limitée, mais si je compare ces personnages à certains guerriers du Seigneur des Anneaux par exemple, la différence est visible). C'est une oeuvre que j'aimerais bien voir adaptée en dessin animé, je pense que ça pourrait donner quelque chose de bien.

Et si malgré tous ces bons points je n'ai pas été transportée par cette lecture, je pense que ça vient surtout de ma fatigue (au début j'ai eu du mal à me souvenir de qui était qui, alors qu'en fait ce n'est pas bien compliqué), et du fait que ce n'était pas le genre de livre dont j'avais besoin à ce moment-là, j'avais envie de quelque chose qui s'attache plus en profondeur à la psychologie des personnages peut-être....

Lundi 15 février 2010

http://bouquins.cowblog.fr/images/livres/deuxjoursatuer.jpgChallenge ABC 2010, 6ème livre lu ♦

Quatrième de couverture :
Rien à dire sur la vie d'Antoine Méliot. Il a une femme ravissante, trois enfants magnifiques, des amis fidèles, une maison dans les Yvelines meublée avec goût, une cuisine équipée et un métier bien payé. Tout ça vous pose un quadragénaire en début de quarantaine. Rien à dire sur la vie d'Antoine Méliot, sinon qu'en ce mois d'octobre, il s'est donné un week-end pour saboter son bonheur : non seulement l'amour fou qui l'unit à sa femme et à ses enfants, mais aussi les liens sacrés qu'il entretient de longue date avec ses meilleurs amis. Deux jours, en vérité, pour détruire une existence. On se demande quelle part peut avoir Marion, ancien amour de lycée, dans ce comportement dément; quelle part, aussi, revient à "l'araignée noire" qu'il nourrit en lui depuis l'enfance et dont il sait qu'un choc violent peut la réveiller.

Ce roman dérangeant, au style aiguisé, brosse avec lucidité le portrait d'un homme qui va au bout de ce qu'il est.

Mon avis : Au début, je n'étais pas très convaincue par le style, je trouvais que l'auteur s'attardait un peu trop sur certains passages (le moment où il rentre chez lui par exemple, quand il n'ose pas encore parler à sa femme), qu'on s'apitoyait un peu trop sur le narrateur... on sent que quelque chose de terrible couve, on ne sait pas encore exactement quoi, on attend que tout explose, et ça met un peu de temps à venir à mon goût. L'explosion survient, et s'étire, la majeure partie du livre est bien flippante, on se demande jusqu'où il va aller, comment ça va finir, comme les autres personnages, nous sommes les spectateurs impuissants de la violence déchaînée du héros, physique et verbale. Les spectateurs, et les victimes aussi, on se sent agressé, il y a une atmosphère malsaine, qui inspire le dégoût, et qui rappelle au lecteur les mauvais moments de ce genre qu'il a pu vivre, vous savez bien, ces moments où des relations s'écroulent, à cause de disputes violentes et imprévisibles, et qui vous laissent exsangues. Et le pire c'est qu'au bout d'un moment, la première surprise passée, on en vient à prendre goût à ce déferlement de haine, à trouver ça jouissif, de voir un homme succomber à toutes ses pulsions, aller trop loin, commettre l'irréparable... on se demande si toute cette cruauté est complètement gratuite, s'il pense tout ce qu'il dit, ou si quelque chose d'inconnu et de plus profond se cache derrière ce comportement incompréhensible.

Le livre est presque fini, le paroxysme du mal a eu lieu, on s'attend à une résolution quelconque, à ce moment-là de ma lecture je ne savais plus trop ce que je pensais du héros : avais-je envie de le maudire, comme je le ferais si j'étais à la place d'un de ses proches dans la réalité, ou d'applaudir la grandeur de son geste ignoble, en me mettant à sa place ? Pas le temps de méditer ces questions, car la fin brutale remet tout en question ; pour essayer de démêler les fils, il faudrait tout relire, tout relire d'un autre œil. Ce que je n'ai ni le temps, ni l'envie de faire pour le moment ; cette fin est peut-être une trouvaille, elle choque le lecteur alors même qu'il pensait ne plus pouvoir être choqué, après tout ce qui s'est passé, et pourtant je crois qu'elle m'a un petit peu déçue, essayer d'expliquer de façon si claire tout le déroulement du week-end, me semble vain. Je ne peux accepter sans la discuter la solution proposée par l'auteur, j'aurais peut-être préféré une fin plus ouverte, ici le dénouement s'impose de telle façon qu'il nous donne l'impression que toute notre lecture a été fausse, et cela me semble un peu facile, et peu crédible, de dire d'un coup qu'on s'est simplement "fait avoir". La réaction de Cécile (sa femme) à la dernière page est cependant à la hauteur du livre, absurde, et elle permet de clore le livre en nous laissant un peu dans le flou, un flou qui me semble plus logique que l'explication rationnelle apportée au moment du dénouement...

(mon avis est peut-être un peu confus, mais la fin m'a vraiment déstabilisée et ce n'est pas évident de la commenter sans la dire...)

Mardi 16 février 2010

http://bouquins.cowblog.fr/images/livres/disgrace.jpgQuatrième de couverture : Âgé de 52 ans et deux fois divorcé, David Lurie enseigne la poésie romantique et la communication à l’université du Cap. Encore jeune de corps et de cœur, ce Don Juan du campus se laisse aller à un dernier élan de désir, d’amour peut-être. Mais la petite étudiante se moque bien de Wordworth et de Byron et l’aventure tourne mal. Convaincu de harcèlement sexuel, David Lurie démissionne.
Réfugié auprès de sa fille Lucy, dans une ferme isolée, il tente de retrouver un sens au seul lien qui compte encore à ses yeux. Mais les temps ont changé. La fracture sociale est arrivée jusqu’au cœur de ce pays et la violence n’épargne pas les campagnes. L’idylle pastorale tourne au cauchemar.
Aussi sombre que magnifique, l’élégie cynique de J. M. Coetzee jette une lumière glacée et crépusculaire sur la nation arc-en-ciel et consigne l’avènement d’un nouvel âge de fer.

Mon avis : une très agréable surprise, ouaiis ! J'ai eu envie de lire ce livre pour découvrir une oeuvre d'un écrivain d'Afrique du Sud (cf mon challenge Tour du Monde), et aussi parce que j'ai vu qu'il était adapté au ciné (mais comme souvent je ne pourrai finalement pas le voir, peut-être en DVD...), mais la quatrième de couv' ne m'attirait que médiocrement. Mon a priori négatif s'est envolé dès les premières pages, je crois que j'aime assez le personnage du prof d'âge mûr perdu qui dérape (le seul exemple qui me vienne en tête, c'est le Humbert Humbert de Lolita, mais j'ai dû en connaître d'autres qui ne me viennent pas à l'esprit là), et le style m'a comblée, parce que sans qu'on ait une narration à la première personne, on se sent très proche du héros, et on ne se limite pas à  une seule chose, c'est très riche : tout n'est pas dit, et pourtant toute la vie, tout ce qui concerne David Lurie est là : ses désirs, intimes et autres, son ex-femme, son opéra en cours d'écriture, ses conflits avec sa fille, son dégoût de la vie qui guette, la conscience de sa vieillesse qui arrive... On le voit humilié, pris au piège de la société et de lui-même, de façon progressive et toujours croissante ; on sent totalement le décalage entre sa vision des choses à lui, et ce que ces choses signifient pour le reste du monde ; accusé d'avoir abusé d'une de ses étudiantes, Mélanie (whouhou ! je dis whouhou parce que c'est mon prénom et j'ai pas l'habitude de le lire, mais on s'en fout en fait hahem fin de la parenthèse), on sait ce qui s'est réellement passé ; notre héros n'est pas innocent, mais impossible de le diaboliser, d'accepter la vision que les autres personnages ont de lui.

Ses problèmes avec sa fille m'ont aussi beaucoup touchée, car malgré son amour pour elle, il ne la comprend pas, ne comprend pas la vie qu'elle s'est choisie ; il ne cesse de tenter de se rapprocher d'elle, il se remet en question en adoptant un nouveau style de vie  tente de l'aider, de résoudre ses propres problèmes, d'avancer, et on ne peut que l'encourager silencieusement, espérer avec lui, même si on a l'impression qu'il s'engage dans une voie sans issue... le personnage de Lucy est lui aussi passionnant, elle reste toujours assez mystérieuse finalement, j'adorerais que le même livre existe avec Lucy comme narrateur ^^

J'ai beaucoup, beaucoup de sympathie pour David Lurie. Lire ce roman revient quelque part à endosser sa vie pour quelques heures, et quand j'ai vu qu'il ne me restait plus que 4 pages je me suis sentie triste et perdue, ce qui est loin d'être une réaction systématique chez moi. La fin m'a glacée. David Lurie est loin d'être un ange, mais il est tellement humain, un pauvre humain façonné par des tas de choses pas bien gaies qui lui sont arrivées... mais ça, c'est la conclusion qu'on tire une fois le livre fini, pas ce que l'auteur cherche à nous asséner de façon lourde comme ça arrive trop souvent (j'ai horreur des livres où on nous dit "regarde mon pauvre héros, plains-le !"), et cette impartialité de l'auteur est aussi une des subtilités qui fait que ce livre vaut vraiment le coup à mes yeux !

Mercredi 17 février 2010

http://bouquins.cowblog.fr/images/livres/lapoursuitedubonheur.jpgQuatrième de couverture : Dans l'Amérique de l'après-guerre minée par ses contradictions, des années noires du maccarthysme à nos jours, La Poursuite du bonheur nous plonge au coeur d'une magnifique histoire d'amour.

Manhattan, Thanksgiving 1945. Artistes, écrivains, musiciens... tout Greenwich Village se presse à la fête organisée par Eric Smythe, dandy et dramaturge engagé. Ce soir-là, sa soeur Sara, fraîchement débarquée à New York, croise le regard de Jack Malone, journaliste de l'armée américaine. Amour d'une nuit, passion d'une vie, l'histoire de Sara et Jack va bouleverser plusieurs générations.

Un demi-siècle plus tard, à l'enterrement de sa mère, Kate Malone remarque une vieille dame qui ne la quitte pas des yeux. Coups de téléphone, lettres incessantes... Commence alors un harcèlement de tous les instants. Jusqu'au jour où Kate reçoit un album de photos... La jeune femme prend peur : qui est cette inconnue? Que lui veut-elle ?

Douglas Kennedy nous livre ici un roman ambitieux où, à travers d'inoubliables portraits de femmes, résonnent les thèmes qui lui sont chers : la quête inlassable du bonheur, la responsabilité individuelle, la trahison.

Mon avis : depuis quelques années, j'avais noté ce livre dans ma LAL, et sur Livraddict il y a quelques temps Pimprenelle a proposé aux Livraddictiens de l'accompagner dans sa découverte de Douglas Kennedy... c'était l'occasion pour moi de découvrir enfin cet auteur. Le but était d'être plusieurs à lire des oeuvres de cet auteur, et de publier nos avis de lecture le 17 février. J'ai pensé un moment me désister car La Poursuite du Bonheur est un pavé (plus de 750 pages en poche), et je l'ai commencé hier en fin de matinée seulement... mais finalement, j'ai réussi à finir ce roman aujourd'hui, ce qui prouve bien qu'il a réussi à me captiver :)

La quatrième de couverture me faisait un peu peur, j'ai tendance à me méfier des bouquins qui nous promettent d'emblée "une magnifique histoire d'amour", au final ça donne souvent des trucs bien mièvres... mais j'ai pris beaucoup de plaisir à suivre pendant deux jours la destinée de Sara. Cela se lit très bien, très vite, le style est vraiment fluide ; sans l'admirer vraiment (on cherche à avancer dans l'histoire sans s'attarder sur la beauté des phrases, je pense que vous voyez ce que je veux dire), il ne m'a pas horripilée non plus. Quelques tournures bateau du genre "Il déposa un rapide baiser sur ma joue", et puis quelques passages un peu niais avec des chapitres qui se ferment sur des "je t'aime moi aussi", mais l'ensemble m'a paru beaucoup plus agréable à lire que le seul Musso que j'ai eu l'occasion de lire par exemple (un Musso de 750 pages je n'aurais pas tenu !). Un peu trop de dialogues et de descriptions matérialistes à mon goût aussi. Mais quand l'héroine se laisse aller à un peu trop de sentimentalité, on voit en souriant qu'elle se reprend elle-même, et pendant tout le long on ne sait trop que penser de ce Jack plutôt lâche, mais qui tente de faire au mieux pour concilier femme et maîtresse... le personnage du frère de Sara, Eric, est tour à tour drôle et touchant.

En somme je dirais que ce roman procure un état d'évasion très satisfaisant, et que c'est un divertissement de bonne qualité, mais ce n'est pas le genre de livres que je porte le plus dans mon coeur non plus ; j'ai grandement apprécie les moments que j'ai passé à lire cette histoire mais je doute qu'elle me marque fortement ; je ne sais pas si je lirai d'autres œuvres de Douglas Kennedy, j'ai lu pas mal que ce livre était considéré comme son meilleur livre, et même si ça a été une bonne lecture, je ne deviendrai pas une groupie de cet auteur non plus... je ne voudrais pas gâcher ma bonne impression en découvrant que ses autres livres se répètent, ce que je crains un peu.

D'autres avis sur ce livre et d'autres du même auteur réunis ici.
Des citations extraites de ce roman .

Dimanche 28 février 2010

http://bouquins.cowblog.fr/images/livres/kitchen.jpgChallenge ABC 2010, 8ème livre lu ♦

[ Coup de coeur !!! ]

(ouais, le deuxième de la journée, et je viens d'ailleurs de commander Mourir et Kitchen, car ce sont vraiment des livres que je veux avoir dans ma bibliothèque pour pouvoir les relire à ma guise !)

Quatrième de couverture : Que faire à vingt ans, après la mort d'une grand-mère, quand on se retrouve sans famille et qu'on aime les cuisines plus que tout au monde ? Se pelotonner contre le frigo, chercher dans son ronronnement un prélude au sommeil, un remède à la solitude. Cette vie semi-végétative de Mikage, l'héroïne de Kitchen, est un jour troublée par un garçon, Yûichi Tanabe, qui l'invite à partager l'appartement où il loge avec sa mère. Mikage s'installe donc en parasite chez les Tanabe : tombée instantanément amoureuse de leur magnifique cuisine, elle est aussi séduite par Eriko, la « mère » de Yûichi Eriko, personnage ambigu et pur, transsexuel à la beauté éblouissante, qui, traversant le récit comme un soleil éphémère, va bientôt mourir à son tour de mort violente...

Banana Yoshimoto révèle dans Kitchen, à travers une sorte de « minimalisme flou », une sensibilité nourrie de paradoxes, une sensibilité dans laquelle toute une génération de jeunes Japonais s'est reconnue.

Mon avis : J'avais sélectionné ce titre pour le Challenge ABC sans grande envie, un peu au hasard, pour avoir un auteur en Y quoi, mais j'avais oublié la quatrième de couverture et je n'attendais pas grand-chose de ce bouquin, je l'ai même ouvert un peu à reculons je dois dire. Et quelle claque ! J'ai immédiatement ressenti énormément d'empathie pour l'héroïne, qui m'a un peu fait penser à Young-goon, l'héroïne du film Je suis un cyborg (si vous connaissez pas, eh bien vous ratez quelque chose, c'est un de mes films préférés !). Ce roman évoque des situations difficiles, Mikage est vraiment désespérée au départ, elle n'a plus envie de rien, la rencontre avec la famille Tanabe est providentielle, et elle ne comprend pas trop pourquoi ils la recueillent, enfin vous voyez, ce genre d'action bonne et désintéressée arrive trop rarement dans la réalité, et ça me fait toujours beaucoup beaucoup de bien de me dire que des choses comme ça existent quand même, ou du moins que des gens les imaginent (mais c'est pareil n'est-ce pas !). Ce roman magnifique essaie de répondre à sa façon à des questions qu'on se pose tous à un moment ou à un autre, par exemple, comment faire pour avancer encore, quand on se retrouve complètement seul, quand ceux qu'on aime ne sont plus là, comment faire pour être de nouveau avec quelqu'un ensuite...?

Le style m'a aussi bluffée, parce que c'est simple sans être simpliste, c'est-à-dire que les personnages, qui ont déjà bien assez de problèmes, essaient de voir les choses simplement, de façon spontanée, sans se compliquer encore plus les choses, ils osent des choses qui pourraient paraître incongrues, ou inconvenantes, et ça les aide beaucoup. Je rêverais de parvenir à voir les choses, à vivre comme ça en fait ! Parfois c'est un peu décousu, mais pas plus que dans la vraie vie, on a la vie en direct, des pensées qui s'ajoutent, et puis des souvenirs qui reviennent, des petites anecdotes, qui surviennent sans qu'on sache trop comment mais qui comptent, qui ont leur place malgré tout dans le présent.

J'ai pas envie d'argumenter posément, j'ai juste envie que vous sachiez que j'ai adoré ce livre, que je viens de le commander donc, et que j'ai déjà envie de le relire pour noter plein de passages doux qui parlent de solitude, de tristesse, d'amitié, et du charme incroyable qui émane de certaines personnes extraordinaires et qui font que la vie vaut le coup quoi qu'il arrive. Mais là je m'emporte, hum. (mais non, j'ai pas à m'excuser merde, j'aime m'emporter !)

Après Kitchen, il y a un autre texte, une nouvelle qui s'appelle Moonlight Shadow, et qui brasse un peu les même thèmes (la perte d'un être cher et comment se reconstruire après), en montrant encore une fois des personnages que j'ai senti proches de moi, et qui sont hors du commun. Les similitudes avec Kitchen ne m'ont pas ennuyée, au contraire, il s'agit des mêmes thèmes mais abordés de façon différente (et je pense que c'est un sujet assez inépuisable de toute façon, on peut parler longtemps de l'amour et de la mort sans se répéter), c'est encore plus douloureux d'une certaine façon, mais des éléments fantastiques viennent bouleverser tout ce marasme... je me suis plus attachée à Mikage, l'héroïne de Kitchen, car cette première histoire est développée plus longuement, et je l'avais encore complètement en tête en commençant à lire Moonlight Shadow, mais cette nouvelle mérité largement qu'on la lise aussi et qu'on s'y intéresse tout autant !

Samedi 13 mars 2010

http://bouquins.cowblog.fr/images/livres/lapiculteur.jpgQuatrième de couverture : "Alors il comprit que l'homme s'était éloigné petit à petit un peu plus du paradis. Et il se prit à rêver de devenir une abeille."

Mon avis : Maxence Fermine : un pseudo que je trouve très beau et qui m'intrigue depuis quelque temps. Un auteur dont j'ignore encore tout (d'abord, homme ou femme ?) Je me suis laissée tenter par l'énigmatique quatrième de couverture...

L'histoire commence en France, en Provence, en 1885, le héros s'appelle Aurélien Rochefer et est un jeune original qui rêve de devenir apiculteur parce qu'il "cherche de l'or". On dirait que l'histoire se déroule dans un tout petit monde, un cocon, les personnages sont peu nombreux et simples, comme dans les contes, ils sont définis par quelques attributs qui les suivent tout le long du roman... on a par exemple Léopold, le père d'Aurélien, cultivateur de lavande, et c'est à peu près la seule chose qu'on saura de lui. Il est toujours associé à la lavande, et à la couleur bleue. Les couleurs sont des éléments très importants dans ce livre.

On nous raconte d'abord les efforts d'Aurélien pour devenir apiculteur, à travers des scènes bucoliques, calmes, dont il se dégage une certaine douceur et une certaine sérénité - douceur et sérénité qu'on retrouve dans tout le roman d'ailleurs, aéré par de nombreux blancs typographiques... Suite à un premier échec, le héros part pour l'Afrique où il va vivre plusieurs années et être obsédé par l'amour. Cette partie du roman est onirique, et le début, plus "trivial" (encore que déjà assez poétique) ne la laissait pas présager. Le héros semble toujours être à la recherche d'une sagesse qu'il espère trouver dans des passions ou bien dans les plaisirs les plus simples de la vie, cela m'a un peu rappelé L'Alchimiste de Paulo Coelho. Certaines images souriantes sont empreintes d'une sentimentalité naÏve, qui ne sera probablement pas du goût de tout le monde, mais qui rend aussi ce roman particulier. La fin plutôt prévisible m'a un peu déçue, j'aurais préféré quelque chose qui sorte plus de l'ordinaire, cependant j'ai trouvé que ce petit livre avait un charme apaisant, et j'aimerais bien lire les autres livres de ce(tte ?) Maxence Fermine...

Extraits :
"Cette nuit-là, tout en marchant dans le désert, Aurélien eut l'intuition de cette chose qui ne vient qu'au moment de mourir : la vie ne tient qu'à la solidité d'un fil. Un fil d'or tissé par les jours où l'on comprend que le besoin d'étancher sa soif sera toujours plus fort que le plaisir de boire. Que le besoin de rester en vie sera toujours plus beau que le plaisir de vivre. Et il eut envie, de toutes ses forces, de rester attaché à ce fil."

"Vous n'êtes pas le premier. Il en passe beaucoup, par ici, de ces voyageurs de l'absolu, de ces chercheurs d'or qui ne cherchent, en fait, qu'une raison de vivre. Je les reconnais du premier coup d'oeil. Ils reviennent plus pauvres qu'avant, leurs illusions en moins. Maintenant, Monsieur, que puis-je faire pour vous ?"


Réponse à ma question existentielle : Maxence Fermine est un homme. Dommage, mais je pense que je m'en consolerai ^^

Samedi 27 mars 2010

http://bouquins.cowblog.fr/images/livres/entretienavecunvampire.jpgQuatrième de couverture : De nos jours, à La Nouvelle-Orléans, un jeune homme a été convoqué dans l'obscurité d'une chambre d'hôtel pour écouter la plus étrange histoire qui soit. Tandis que tourne le magnétophone, son mystérieux interlocuteur raconte sa vie, sa vie de vampire.

Mon avis : aaaah, enfin ! Cela faisait bien longtemps que je voulais le lire mais il est épuisé et je ne parvenais pas à le trouver en bibliothèque, merci à Claire-Marie de me l'avoir prêté ! :D (et en cherchant l'image de la couverture sur priceminister pour cet article, j'ai vu une annonce qui le proposait à 4 euros et du coup je l'ai commandé à l'instant, contente !)
Je n'ai pas été d'emblée séduite par ce roman. Je n'aime pas trop les moments où on nous rappelle la situation d'énonciation, le jeune homme qui écoute les confessions de Louis m'a paru plutôt inutile et idiot, forcément fade comparé à Louis, et les descriptions de son effroi face à ce qu'il écoute m'ont paru banales, sans intérêt.... Avant que le récit de Louis ne commence, je me suis dit "ohlàlà dans quoi je m'embarque", mais une fois que Louis est lancé dans son récit le style s'améliore largement (et le récit de Louis constitue environ 95% du livre alors ça va !)

L'histoire est riche et développée, et on suit toute la progression de Louis, depuis son existence de mortel, je me suis complètement attachée à ce personnage, qui a une véritable profondeur psychologique, on suit l'évolution douloureuse de sa mentalité, sa transformation en vampire est loin d'entraîner chez lui un changement fixe et stable, on voit au contraire que tout se fait progressivement, pendant longtemps Louis va garder des principes moraux qui vont l'empêcher de basculer véritablement dans le monde des vampires, et le voir ainsi rongé par la culpabilité est troublant, comme on s'attache forcément à lui, on est presque tenté de l'inciter à commettre les meurtres qu'il s'empêche d'abord de commettre et qui le soulageraient pourtant.... j'ai eu peur à un moment que l'histoire stagne, qu'on reste sans fin embourbé dans des problèmes de cet ordre, mais Louis va dépasser ce premier stade de culpabilité pour en connaître bien d'autres !

Les autres personnages de vampires sont peu nombreux donc chacun a une grande importance : en plus d'être enfermé dans sa condition de vampire qui l'isole à jamais des autres mortels, Louis est de plus aliéné par l'influence de celui qui l'a transformé, Lestat, qui lui semblait merveilleusement charismatique au début mais dont l'aura se dissipera à cause de certains évènements, et surtout parce que ces deux-là n'ont absolument pas la même vision du monde.
J'ai adoré le personnage de Claudia, et le personnage d'Armand enfin m'a beaucoup intriguée ! L'existence de Louis est tour à tour passionnée et brillante, violente, désespérée : les descriptions des meurtres qu'il commet sont assez crues, et ce qui est troublant surtout, c'est l'érotisme qui s'y mêle, l'acte de tuer est la jouissance suprême du vampire, et comme tout nous est expliqué du point de vue de Louis, difficile de ne rester insensible à ces descriptions, qui nous laissent pourtant voir des choses horribles ! Les relations entre vampires sont très fortes et ambigües, et n'ont pas vraiment d'équivalent dans le monde des humains, ou alors des équivalents absolus ou qu'on pourrait considérer comme pervers (quand je pense à la relation entre Louis et la petite Claudia par exemple)...

Je suis sortie de cette lecture assez déprimée je dois dire, je ne parviens pas trop à me dégager de ce livre d'ailleurs (alors que ça fait plusieurs heures que je l'ai fini !), vraiment l'impression que Louis m'a communiqué son désespoir... maintenant j'aimerais bien lire le tome suivant, mais ça m'ennuie un peu qu'il s'appelle Lestat le vampire, parce que là je n'ai envie que de continuer à connaître l'histoire de Louis, Lestat ne m'intéresse pas,  zut, je l'aime paas ! Enfin bref, je vais vous recopier un passage que j'aime bien puis j'essaierais de me trouver une occupation qui me changera les idées ^^ J'aimerais bien voir le film aussi !

Extrait :

"Combien pensez-vous qu'il y ait de vampires qui aient la trempe nécessaire pour affronter l'éternité ? Pour commencer, ils ont de l'immortalité les notions les plus sinistres. Car, en devenant immortels, ils voudraient que tout ce qui a été l'accompagnement de leur vie devienne immuable et incorruptible comme ils le sont eux-mêmes. Que les véhicules gardent la même forme rassurante, que les vêtements conservent la coupe qui leur allait du temps de leur jeunesse, que les hommes continuent de s'habiller et de parler de la façon qu'ils ont toujours comprise et appréciée. Alors qu'en réalité tout change, sauf le vampire lui-même ; tout, à l'exception du vampire, est soumis à la décomposition et à la corruption permanentes. Bientôt, si l'on possède une âme peu flexible, et souvent même si on l'on est doué de souplesse d'esprit, l'immortalité devient une peine de prison que l'on purge dans une maison de fous peuplée de figures et de formes totalement inintelligibles et sans valeur. Un soir, le vampire en se levant se rend compte que ce qu'il a craint, pendant des dizaines d'années peut-être, est arrivé : il se rend compte tout simplement qu'à aucun prix il ne veut vivre davantage. Que les styles, les modes, les formes d'existence qui lui rendaient l'immortalité attrayante ont tous été balayés de la surface du globe. Et que rien ne subsiste qui puisse le libérer du désespoir, sinon l'acte de tuer."

Jeudi 8 avril 2010

http://bouquins.cowblog.fr/images/livres/lesescaliersdechambord.jpgQuatrième de couverture : Un homme a froid parce qu'il a oublié un ancien prénom. Il collectionne sur la terre entière tout ce qu'une main d'enfant peut étreindre. A Rome, à Tokyo, à Paris, à Londres, Edouard Furfooz vend des vieux jouets, des poupées, des miniatures, des dessus de tabatière : il vend les dons des Saturnales. Arrive le solstice d'hiver, où tout ce qui est petit est aimé, où les jours sont les plus courts. Alors que l'année, le feu, le soleil se préparent à revenir, c'est un intense amour qui revient.
Mon avis : assurément ma meilleure lecture d'avril ! (oui, je peux dire ça puisque je rédige mon avis début mai). La quatrième de couverture est assez énigmatique, alors laissez-moi vous éclairer un peu - même si vous pouvez aussi parfaitement choisir de lire le livre sans rien savoir ou presque, c'est ce que j'ai fait et je m'en porte très bien ! Le héros, Edouard Furfooz, est un collectionneur et marchant de jouets anciens qui ne cesse de voyager et qui connaît au cours du roman de nombreuses liaisons amoureuses. Ce héros ne se sent pas serein, il a l'impression malgré toutes ses conquêtes de ne pas réellement être capable d'aimer, et on comprend, au fur et à mesure, que ce "blocage" est lié à un souvenir d'enfance qu'il a si bien enfoui qu'il ignore de quoi il s'agit... et le roman est l'histoire de cette quête. Quête passionnante et qui mène à une révélation bouleversante.

Le personnage d'Edouard, enfantin et qui a des goûts bien tranchés, est très attachant. Les autres personnages ont aussi tous des particularités qui les rendent intéressants, atypiques, et comme je l'ai dit, la quête du souvenir est passionnante ; le lecteur sent qu'il y a quelque chose à trouver, cherche des indices, essaie de deviner les choses avant le personnage... mais malgré tous nos efforts, la révélation nous laisse baba, et j'aimerais relire ce livre pour voir tous ces indices disséminés tout au long du livre d'un autre œil ; j'en ai déjà vu pas mal puisque j'ai eu un exposé à faire sur cette œuvre en théorie littéraire, on a cherché à le disséquer, à le comprendre à fond, et je vous assure qu'il y a vraiment de quoi faire ! :p

Le style enfin m'a ravie, Pascal Quignard a une façon très belle et très spéciale de voir les choses ; pas de phrases emberlificotées, non, mais des phrases simples qui touchent, qui nous font voir les choses autrement, à travers les yeux de l'étonnant Edouard Furfooz, nous voyons la beauté du monde. De nombreux beaux passages qu'on a envie de noter, en bref je vous conseille fortement ce livre ! :)

Extraits :

"La lumière du soleil devenait si blanche et si vive qu'elle lui était pénible aux yeux. On était en mai. Il se dit qu'il achèterait des lunettes de soleil qui protègeraient ses yeux de l'intensité des rayons du soleil. Il se reprocha sur-le-champ de vouloir se protéger de la beauté du monde."

"Il ne savait plus s'il aimait l'amour. Les parades, la dépendance, le désir et les caquets, les joutes de domination - dans le fond ce sentiment peu humain était, depuis plus de deux siècles, parfaitement surestimé."


"Ce qu'Edouard admirait dans les chats - au contraire des chiens ou des amis ou de lui-même - était qu'ils ne cherchaient pas à plaire. Ils n'étaient pas comme ils croyaient qu'ils devaient être. Ils sont. Ils se taisent comme à jamais, comme définitivement. Ils triomphent."

Samedi 15 mai 2010

http://bouquins.cowblog.fr/images/livres/woulesouvenirdenfance.jpgQuatrième de couverture : Il y a dans ce livre deux textes simplement alternés ; il pourrait presque sembler qu'ils n'ont rien en commun, mais ils sont pourtant inextricablement enchevêtrés, comme si aucun d'eux ne pouvait exister seul, somme si de leur rencontre seule, de cette lumière lointaine qu'ils jettent l'un sur l'autre, pouvait se révéler ce qui n'est jamais tout à fait dit dans l'un, jamais tout à fait dit dans l'autre, mais seulement dans leur fragile intersection.

L'un de ces textes appartient tout entier à l'imaginaire : c'est un roman d'aventures, la reconstitution, arbitraire mais minutieuse, d'un fantasme enfantin évoquant une cité régie par l'idéal olympique. L'autre texte est une autobiographie : le récit fragmentaire d'une vie d'enfant pendant la guerre, un récit pauvre d'exploits et de souvenirs, fait de bribes éparses, d'absences, d'oublis, de doutes, d'hypothèses, d'anecdotes maigres. Le récit d'aventures, à côté, a quelque chose de grandiose, ou peut-être de suspect. Car il commence par raconter une histoire et, d'un seul coup, se lance dans une autre : dans cette rupture, cette cassure qui suspend le récit autour d'on ne sait quelle attente, se trouve le lieu initial d'où est sorti ce livre, ces points de suspension auxquels se sont accrochés les fils rompus de l'enfance et la trame de l'écriture.
 
G.P.

Mon avis : un autre livre pour les cours (sur le roman réflexif encore), et que j'avais également prévu de lire depuis longtemps. J'étais enthousiaste à l'idée de lire ce livre, parce que j'aime énormément l'auteur pour son livre Un homme qui dort qui reste un de mes livres de chevet. Il s'agit en partie d'une autobiographie (pour la période de l'enfance uniquement), ou plutôt d'une quête du passé, que l'auteur nous retranscrit de façon progressive, en réfléchissant à son travail d'autobiographe, puisqu'il écrit au début de façon étonnante : "Je n'ai pas de souvenirs d'enfance."... l'enjeu du livre va donc être en partie de comprendre les raisons de cette absence (relative) de souvenirs. Le début de la partie autobiographique m'a beaucoup plu, mais j'ai été un peu déçue par la suite : quand Perec entre dans le vif du sujet et nous narre des anecdotes précises sur son enfance, je me suis demandée parfois où il voulait en venir, pourquoi il s'attardait sur tel passage, même si on voit que certains motifs sont liés à l'absence de ses parents (le motif de la blessure par exemple), et qu'ils n'ont en fait rien d'anodins, à la lecture le fait qu'il s'appesantisse sur certains détails ne m'a pas passionnée, même si ces passages sont significatifs.

Je pensais être moins intéressée par les passages qui décrivent la vie à W, la structure de cette société "idéale" où le Sport est roi, mais contrairement à ce à quoi je m'attendais (certains de mes camarades m'avaient dit s'être ennuyés en lisant certains de ces passages), cette partie du livre m'a entièrement plu, je l'ai préférée à la partie où l'auteur raconte ses souvenirs... il faut dire aussi que je connaissais d'avance le fin mot de l'histoire, je savais quel était l'élément qui permettait de se faire rejoindre les deux parties, l'autobiographique et la fictive : la révélation finale qui relie les deux n'a donc pas été une surprise pour moi car on me l'avait lue avant que je ne commence le livre (et j'ai eu envie de pleurer à ce moment-là, et c'est rare qu'un texte si court me fasse tant d'effet, surtout lu à voix haute - j'ai du mal avec les textes lus à voix haute, en général je préfère lire par moi-même)... en lisant les passages qui parlaient de W, je cherchais donc à voir quels étaient les indices qui permettaient de deviner la clé de lecture, et cet exercice m'a glacée et émue.

Je dois aussi préciser pour finir que je ne suis pas non plus dans une bonne période livresque, après être restée un bon moment sans lire ou presque (par rapport à des périodes où j'ai lu beaucoup plus) je me réhabitue doucement, et j'ai lu ce livre d'une façon fragmentaire qui je pense, a beaucoup nui à ma lecture ; j'aimerais le relire plus tard dans une meilleure période.

Mercredi 19 mai 2010

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Challenge ABC 2010, 10ème livre lu ♦

Quatrième de couverture :
Après avoir été donné pour mort et à peine sorti de l'hôpital, un écrivain retrouve l'inspiration grâce à un étrange carnet bleu. Après un long séjour à l'hôpital, l'écrivain Sidney Orr est de retour chez lui. Toujours aussi amoureux de sa femme Grace, il reprend lentement goût à la vie. Mais il est accablé par l'ampleur de ses dettes et par l'angoisse de ne plus jamais retrouver l'inspiration.
Un matin, alors qu'il fait quelques pas dans son immeuble, il découvre une toute nouvelle papeterie, au charme irrésistible.
Sidney entre, attiré par un étrange carnet bleu.

Le soir même, presque dans un état second, Sidney commence à écrire dans le carnet une captivante histoire qui dépasse vite ses espérances. Sans qu'il devine où elle va le conduire. Ni que le réel lui réserve les plus dangereuses surprises...

Virtuosité, puissance narrative, défi réciproque de l'improvisation et de la maîtrise, La Nuit de l'oracle, publié par Actes Sud en 2004, précipite le lecteur au cœur des obsessions austériennes, dans un face à face entre fiction et destin. Comme si l'imaginaire n'était rien d'autre que le déroulement du temps avant la mort. Ou pire encore, son origine.

Mon avis : Whaouh ! Depuis plusieurs années, je me disais qu'il faudrait que je découvre un jour Paul Auster, mais bizarrement aucune des quatrièmes de couverture de ses livres ne me tentait vraiment, c'est pourquoi je me suis un peu "forcée" à le lire en l'intégrant au challenge ABC. Eh bien je ne regrette pas, parce que j'ai tout simplement adoré ! Déjà, il faut croire que j'adore les livres qui ont pour héros un personnage d'écrivain (autres exemple de livres que j'ai adorés : Le Choix de Sophie_ de Styron, Petit déjeuner chez Tiffany_ de Truman Capote...). J'ai très vite trouvé Sidney Orr très sympathique, et le livre est écrit d'une telle façon que je me suis complètement prise au jeu, j'ai eu du mal à me souvenir que c'était un personnage fictif, car le livre dans son ensemble a une densité qui le rend très réaliste !

Une particularité du style d'Auster (je ne sais pas si on le retrouve dans ses autres livres vu que c'est mon premier Auster - mais assurément pas le dernier), ce sont les notes, qui peuvent être assez longues et forment des petits récits à part entière ; au début par exemple, il parle d'un personnage qu'il est en train de créer en s'inspirant de sa femme, et ce passage-là est rattaché à une note qui s'étale sur trois pages et dans lequel il digresse jusqu'à nous raconter sa rencontre en détails avec sa femme, ce qu'il a précisément ressenti à ce moment-là... cela oblige à faire une pause dans notre lecture et ça m'a d'abord un peu destabilisée, j'ai même pensé "ohlàlà c'est quoi ce truc j'espère que ça va pas tout le temps faire ça !", mais en fait ce n'est pas gênant, car les notes sont placées de telle sorte qu'on ne perd pas le fil et que reprendre notre lecture ensuite est très facile, et ces notes apportent beaucoup, on a vraiment l'impression que l'auteur veut se confier à nous sincèrement, qu'il tient à nous donner toutes les cartes en main, toutes les informations indispensables pour se sentir proche des personnages et ainsi bien comprendre la situation.

Très vite, l'auteur installe plusieurs niveaux de lecture : il y a le récit de Sydney Orr, qui nous raconte son retour à la vie et surtout à l'écriture grâce au carnet bleu ; il y a le récit qu'il écrit dans le carnet bleu, l'histoire d'un homme qui quitte brutalement son ancienne vie : cette histoire est passionnante et nous avons l'impression d'accompagner l'écrivain dans l'écriture, elle se construit progressivement sous nos yeux ! A l'intérieur du récit de la vie de Sydney Orr (le récit principal donc), on peut trouver d'autres récits, car on s'intéresse beaucoup à son entourage, aux histoires personnelles des autres personnages : il y a John Trause, ami de Sydney, lui aussi écrivain, il y a Grace, la femme de Sydney, qui, on le sent, a un problème, mais on ne parvient pas tout de suite à savoir de quoi il s'agit. Il y a M. R. Chang, le drôle d'énergumène qui tient la papeterie...

C'est vraiment un roman très riche (et qui aurait eu sa place je pense dans le programme de mon cours sur le roman réflexif), et évidemment bien mieux construit que mon avis, on passe d'un récit, d'un personnage à l'autre de façon fluide et agréable, sans difficultés, sans se perdre, car tout semble lié de façon si logique ! Au fur et à mesure qu'on avance dans le roman, les liens qui unissent les différents niveaux du récit semblent de plus en plus forts, cela devient effrayant, vertigineux, je crois que c'est le mot que j'utiliserais si je devais résumer ce livre en un mot., et j'ajouterais que pour couronner le tout, c'est un roman qui donne envie d'écrire. L'imagination prend un pouvoir incroyable, le destin des différents personnages m'a beaucoup touchée (j'ai été assez émue par la fin), j'avais prévu hier soir de ne pas dépasser la page 100 parce que j'étais fatiguée en commençant ma lecture mais j'ai été si captivée qu'en fait j'ai fini le livre dans la nuit ! Gros coup de cœur !

Mercredi 26 mai 2010

http://bouquins.cowblog.fr/images/livres/frannyetzooey.jpgQuatrième de couverture : " Quelque part dans Gatsby le Magnifique (qui fut mon Tom Sawyer à moi quand j'avais douze ans), le jeune narrateur fait remarquer que tout le monde pense avoir au moins l'une des vertus cardinales, et il poursuit en disant que la sienne, Dieu merci, est l'honnêteté. Je pense que la mienne est de savoir la différence entre une histoire mystique et une histoire d'amour. Je dis que généralement je fais non pas des histoires mystiques ou des mystifications religieuses, mais une histoire d'amour complexe, multiple, pure et composée. "
J.D. Salinger

Mon avis : hum, je ne suis pas sûre d'avoir compris ce roman à 100% mais globalement j'ai bien aimé (et méfiez-vous, dans les lignes qui suit je vais avoir tendance à raconter l'histoire, alors spoiler on). L'enchaînement des scènes, des dialogues (ou plutôt des conversations) entre les personnages se fait de façon assez cinématographique, un lieu est décrit pour la première fois quand un personnage y fait son entrée, la narration ne propose donc pas de grande surprise, mais ce n'est pas vraiment un reproche, car c'est bien fait. J'ai surtout aimé le début : Franny est avec son petit ami, Lane, qui l'exaspère, et elle s'en veut de ne pas être plus gentille avec lui ; elle se rend compte qu'en fait tout le monde l'exaspère, que les comportements des gens en général lui sont insupportables ; elle va alors en quelque sorte s'extraire du monde et a une espèce de "crise mystique" (même si Salinger dit que ce n'est pas une histoire mystique, je ne vois pas trop comment appeler ça autrement, même si c'est sûr que c'est plus compliqué que ça...).

Le reste du roman se déroule dans la maison des parents de Franny, et sa famille va chercher à comprendre ce qui lui arrive, et à la secourir ; le passage où Zooey (frère de Franny, acteur), et Bessie (leur mère) sont dans la salle de bains est assez long et fait vraiment réaliste, la conversation n'est pas coupée, même les répliques les plus banales d'une conversation nous sont rapportés. Je pense ne pas avoir bien saisi toutes les réflexions philosophico-religieuses que Zooey tient à sa sœur, je me suis sentie parfois un peu larguée même si je pense avoir compris l'essentiel : il cherche à la persuader que son comportement (elle prie sans cesse) n'est pas moins absurde que les autres comportements habituels des humains qu'elle rejette.

Franny est un personnage sensible, complexe, on comprend que la scène avec son petit ami du début a eu un rôle déclencheur, et on sent aussi que sa crise est lié à la souffrance dûe à la mort de deux de ses autres frères, mais on n'a cependant pas tous les éléments pour bien comprendre ce qui se passe dans sa tête, et elle-même semble trop perdue pour bien savoir ce qu'elle fait ; son désir de s'extraire du monde m'a un peu rappelé le comportement d'Un homme qui dort de Perec (bon, d'accord, j'ai aussi un peu tendance à tout rattacher à ce livre) ; Franny remet en question l'ensemble de nos modes de vies, elle n'accepte pas ce qui va pourtant de soi pour tout le monde, et dans ce sens on peut aussi un peu la rapprocher du personnage d'Holden Caufield, le héros de l'Attrape-coeurs du même auteur. Un roman qui m'a donc plu, mais je pense que j'aurais été plus sensible au désarroi de Franny si elle n'avait pas choisi la religion comme béquille, ce choix m'a un peu empêché de m'identifier vraiment au personnage (c'est mon côté mécréant qui ressort...).

J'aurais aussi aimé que les autres personnages soient plus développés, j'aurais par exemple aimé en savoir plus sur Buddy, un autre des frères, et qui correspond plus au moins du narrateur (de l'auteur ?),  et qui intervient finalement assez peu au cours du récit sauf dans un passage au début de la partie "Zooey" (deuxième et dernière partie du roman) dans lequel il présente son texte comme un "film domestique en prose" et dans lequel il présente les différents personnages ; j'ai cependant lu qu'on retrouve les personnages de la famille Glass dans d'autres œuvres de Salinger, les lire me permettra donc peut-être de combler ma curiosité concernant ces personnages. :)

Extraits :
"J'en ai assez de l'ego, de l'ego, de l'ego. Du mien et de celui des autres. J'en ai assez de tous ceux qui veulent arriver à quelque chose, faire quelque chose de distingué, être intéressants. C'est écoeurant, écoeurant, écoeurant. Ce que les gens disent m'est égal (...) J'en ai marre de n'avoir pas le courage d'être quelqu'un de très ordinaire. J'en ai assez de moi et de tous les gens qui veulent se faire remarquer." (paroles de Franny)

"- Je voudrais que tu te maries, dit Mme Glass sans transition. (...) Je le voudrais vraiment. Pourquoi t'y opposes-tu ? (...)
- J'aime trop prendre le train. On ne peut plus jamais avoir un coin fenêtre, quand on est marié."

"Tu auras eu de la veine si tu trouves le temps d'éternuer dans ce monde incroyable."

Vendredi 28 mai 2010

http://bouquins.cowblog.fr/images/livres/parsviteetrevienstard.jpgQuatrième de couverture : "Entre la peste diffusée par lettres anonymes, arrière-plan historique immédiatement menaçant, et le génial personnage du Crieur, sorte de phare vers lequel convergent les divers personnages en vagues régulières, Pars vite et reviens tard se révèle aussi finement taillé que le diamant clé de l'histoire."

Mon avis : Un livre que j’ai eu envie de lire pour deux raisons : d’abord j’ai eu une prof en seconde qui était fan de Fred Vargas et qui m’avait donc donné envie de m’y intéresser ; j’ai lu L’Homme aux cercles bleus_ il y a 3 ans, j’avais bien aimé et je me disais qu’un jour je lirais d’autres bouquins du même auteur ; j'avais oublié cette résolution mais je m'en suis souvenue il y a quelques mois, et j'ai choisi le lire Pars vite et reviens tard parce que j'ai trouvé le titre beau et intriguant... et j'ai bien fait.

J'ai beaucoup aimé le personnage du Crieur, à l'heure de la haute technologie au service des médias tout-puissants, cet homme anime chaque jour la vie d'un quartier parisien en criant des messages divers et anonymes et des petites annonces, je trouve que ça a beaucoup de charme et que c'est loin d'être idiot. J'ai retrouvé avec plaisir le personnage d'Adamsberg ;  je me suis vite remémoré sa personnalité, faut croire qu'il m'avait marqué dans L'Homme aux cercles bleus). Perspicace et intuitif comme tous les héros de romans policiers, mais avec ses défauts, ses propres failles... son histoire d'amour avec Camille en arrière-plan lui rajoute une part d'humanité (il n'est pas qu'un cerveau) et de mystère (Camille semble être une énigme insoluble à elle toute seule).

En ce qui concerne l'intrigue policière à proprement parler, elle est amenée progressivement et tant mieux, je trouve ça moins brusque que si on avait un cadavre sur les bras dès le début, là on a vraiment le temps d'entrer dans l'univers du quartier, de découvrir les personnages... Évidemment, je n'ai pas deviné qui était le tueur, et ses mobiles sont plutôt bien trouvés même si j'ai été presque déçue lors de leur révélation : étant donné toute la complexité de la mise en scène des meurtres, je m'attendais à des mobiles un peu moins triviaux....

Un autre bon point pour Fred Vargas, c'est son style : chaque personnage a sa façon de parler, en passant de l'un à l'autre on parvient à sentir quel est l'univers de chacun, Adamsberg, en discutant avec des gens pour les besoins de l'enquête, parvient souvent à avoir de belles conversations avec eux, courtes mais riches de sens, pleines de métaphores... et d'ailleurs peut-être un poil trop poétiques pour être réalistes, mais je pardonne sans peine ces envolées à Fred Vargas puisqu'avec ses romans apparemment on n'a pas à choisir entre le style et l'intrigue, c'est bien écrit, et bien ficelé.  Je pense que je n'attendrai peut-être pas 3 ans avant d'en lire un troisième de cet auteur ; lequel me conseillez-vous ?

Lundi 14 juin 2010

http://bouquins.cowblog.fr/images/livres/lapianiste.jpgPour un public averti
 
CHALLENGE ABC 2010, 11ème livre lu ♦

Quatrième de couverture : Elle ne boit pas, ne fume pas, couche encore à 36 ans dans le lit maternel et aime bien rester chez elle. Chaque fois que ses horaires de professeur de piano au conservatoire de Vienne le lui permettent, elle se plaît à fréquenter les cinémas pornos, les peep-shows et les fourrés du Prater. Et quand un de ses étudiants tombe amoureux d'elle, Erika Kohut ne sait lui offrir en échange qu'un scénario éculé, propre à redorer la vieille relation du maître et de l'esclave.
Cru, féroce et en même temps d'un comique irrésistible, ce livre n'épargne ni l'amour maternel et ses vaines ambitions, ni la vénérable institution qu'est à Vienne la grande musique, ni le sexe et ses névroses.

Mon avis : Il y a un an ou deux, j'ai vu le film de Mickael Haneke avec Isabelle Huppert, Benoît Magimel et Annie Girardot. Film interdit aux moins de 16 ans qui m'avait un peu choquée à l'époque mais qui m'avait tout de même beaucoup plu puisque je l'ai regardé une deuxième fois avant de le rendre à la médiathèque. J'ai appris il y a quelques mois, sur le blog des-mots-sans-bruit, que ce film était l'adaptation d'un livre ; sur ce blog le livre était présenté comme difficile, tant du point de vue du contenu que sur celui de la forme ; cette critique m'a intriguée, et j'ai pris cette lecture comme un défi, et j'ai finalement décidé d'entreprendre cette lecture non sans appréhension... en empruntant ce livre j'ai été très étonnée (et enthousiasmée, je dois le dire ^^) de découvrir que ce livre avait été traduit par Yasmin Hoffmann, une prof de ma fac que j'ai connue grâce à un cours portant sur les liens entre cinéma et psychanalyse, cours qui m'avait beaucoup plu ; du coup, voir que ce livre avait été traduit par elle m'a donnée encore plus envie de le lire et c'est pleine de bonne volonté que j'ai commencé ma lecture. :D

Allez, j'arrête le suspense : j'ai beaucoup aimé cette lecture. (j'ai même envie de dire que j'ai adoré) Ma très grande envie de lire une œuvre traduite par ma chère Mme Hoffmann (même si je ne l'ai connue que quelques mois, ce professeur m'a vraiment fait une très grande impression !) et ma connaissance préalable du film m'ont sans nulle doute bien aidée à apprécier cette oeuvre qui, il est vrai, n'est pas forcément très accessible. Ce roman se divise en deux parties : dans la première on fait amplement connaissance avec le personnage d'Erika et de sa mère : on comprend vite que leur relation est à la fois fusionnelle et malsaine, "l'enfant" (c'est ainsi qu'est désignée Erika de façon récurrente, malgré ses 36 ans) est totalement soumise à sa mère. La narration est très originale : on pense d'abord avoir affaire à un narrateur externe, à une description froide des choses, mais on se rend compte très rapidement qu'en réalité on a sans arrêt les pensées et les paroles rapportées des personnages, qui se mêlent également à des récits rétrospectifs qui nous permettent de connaître l'adolescence d'Erika. Aucun indice dans le texte ne nous aide à repérer de façon très nette les différents récits pour opérer des distinctions (si ce n'est que dans le récit rétrospectif Erika est désignée par le pronom ELLE, en majuscules). Le résultat ? Un texte décousu, mais j'hésite à employer ce terme de "décousu" qui a une connotation péjorative.... alors que ce côté décousu m'a charmée.

On ne peut dire précisément qui est le narrateur, quel est le point de vue adopté : certaines façons de désigner tel personnage laissent penser qu'il s'agit d'un jugement que la mère porte sur sa fille par exemple, mais la ligne suivante désamorce cette interprétation puisqu'on a une sensation qui ne peut être ressentie que par Erika... on est donc sans arrêt dans le flou, mais ce flou correspond très bien à la personnalité des personnages : Erika ne semble pas avoir d'identité propre tant elle est écrasée par sa mère, elle se juge donc elle-même de façon négative, avec les mots qu'utilisent sa mère à son égard ; et quand elle tente de mener sa vie propre, il s'agit d'une vie de perversités, comme si en s'exposant, en recherchant une sexualité violente, Erika cherchait à fuir pour de bon l'autorité maternelle, d'une part en faisant des choses que sa mère désapprouverait complètement, d'autre part en cherchant à se stimuler, à voir si elle peut sentir quelque chose en-dehors du cocon familial, si elle est capable d'avoir des désirs propres...

Alors même que le lecteur la suit dans son intimité, une intimité pleine d'horreur et de saleté (scènes de voyeurisme, de mutilation...) on ignore toujours ce que pense véritablement Erika ; de même, quand elle pourrait commencer un semblant d'histoire d'amour avec Walter Klemmer, elle gâche tout en refusant de se laisser aller, et en essayant de l'entraîner dans ses délires sado-masochistes... désirs qui vont tragiquement finir par se retourner contre elle ! Renversement de situation qui correspond sans doute au "comique irrésistible" mentionné par la quatrième de couverture, mais il s'agirait alors d'humour noir, indissociable d'une cruauté sans fond.

Le personnage d'Erika est véritablement passionnant et pourrait être analysé, interprété sans fin, il est le sujet central du roman tout en restant insaisissable ; Erika n'a rien de sympathique, elle apparaît la plupart du temps comme une victime consentante qui se complaît dans sa prison, ne fait aucun vrai effort pour s'en échapper, manque de courage pour se construire une véritable vie, sa vie secrète liée à la sexualité est uniquement passive, Erika cherche à assister à des actes violents, pas à rencontrer l'âme sœur pour aimer de façon authentique, tout en elle semble pourri, foutu... son comportement en public en tant que professeur est froid, désagréable, elle peut même sembler carrément méchante. Et pourtant, dès le début (peut-être parce que je connaissais déjà la fin, ayant vu le film) j'ai ressenti beaucoup de compassion pour elle. Difficile de dire qui est le méchant de l'histoire : la mère est un bourreau certes, mais un bourreau tellement dominé par ses propres faiblesses qu'il est impossible de la considérer comme un monstre qui aurait prémédité tout le mal qu'elle fait. Le personnage de Walter Klemmer inspire lui aussi de la pitié, mais son côté Don Juan a fait que je n'ai pas réussi à m'attacher à lui, et au fond c'est peut-être lui que je méprise le plus...

Ce roman nous présente donc trois personnages très différents et pourtant  unis car tous trois par leur soumission à leurs pulsions les plus négatives... une immersion totale dans l'intériorité des personnages, une intériorité à laquelle on n'a paradoxalement accès que partiellement, ce qui fait sans doute tout la force de ce roman incroyable, et sa richesse, richesse qui entraîne forcément une grande densité et donc de possibles difficultés à la lecture, même si personnellement j'ai été totalement prise par ce roman et que je n'ai pas eu à faire d'effort pour le finir en deux jours. Attention, certaines scènes sont un peu "hard", même si je dois dire que je m'attendais à pire : rien d'insoutenable à mes yeux, mais il est vrai que le fait d'avoir vu le film au préalable a dû me constituer la préparation psychologique nécessaire ! A présent, j'ai envie de re-revoir le film, et de lire d'autres œuvres du même auteur (et accessoirement d'envoyer un mail admiratif et béat à ma prof mais je vais peut-être m'abstenir, ou pas !)

(hum, je crois que c'est la première fois que je fais un avis aussi long, bravo à ceux qui m'auront lue, et le pire c'est que je n'ai pas l'impression d'avoir tout dit !)

Extraits :
"Mieux vaut user de ses semelles, pensent les dames Kohut, que servir de paillasson."

"Ni comme créateur ni comme virtuose Schubert ne correspondait à l'image de génie que se fait la foule. Klemmer, lui, n'est qu'un avec la foule. La foule se fabrique des images et n'est contente que lorsqu'elle les rencontre en pleine nature. Schubert ne possédait même pas de piano, quel bien-être est le vôtre en comparaison, M. Klemmer ! Quelle injustice de voir Klemmer en vie, de le voir renâcler au travail alors que Schubert est mort ! Erika Kohut insulte un homme dont elle souhaite pourtant être aimée. Maladroite, elle s'emporte contre lui, des mots blessants résonnent sous le voile de son palais, sur la membrane de sa langue. La nuit, son visage se tuméfie, tandis que sa mère ronfle innocemment à ses côtés. Au réveil, devant la glace, Erika arrive à peine à discerner ses yeux, au milieu de tant de drapés. Elle travaille beaucoup sur son image, mais celle-ci ne s'arrange pas. Une fois de plus, homme et femme s'affrontent en un face à face figé."

"Victime d'une sorte de crise d'asthme, elle lutte violemment pour reprendre son souffle, et ensuite ne sait que faire de tout cet air."

Samedi 19 juin 2010

http://bouquins.cowblog.fr/images/livres/onsyfera.jpgQuatrième de couverture : Quand on découvre que Zardjou, l'homme qui remet en question la vie d'Arezou, est marchand de serrures, on peut y voir l'ironie d'un signe plus subtil qu'il n'y paraît. Les apparences sont trompeuses ; on entre avec plus de vigilance et de curiosité dans une belle histoire d'amour.
À travers le destin d'une femme active, divorcée, partagée entre sa mère et sa fille, trois générations s'affrontent dans un monde où règnent depuis longtemps les interdits et le non-dit. On suit Arezou, au bord du rire ou des larmes, sous la neige, espérant avec elle profiter enfin d'une certaine beauté de la vie.
Dans un roman d'une richesse et d'une vigueur exceptionnelles, Zoyâ Pirzâd brosse à la fois le portrait d'une société pleine de contradictions et celui d'une femme passionnante, aussi drôle et attachante qu'une héroïne de Jane Austen.

Mon avis : J'avais été charmée par le style doux de Zôya Pirzâd dans Comme tous les après-midi et Le Goût âpre des kakis, deux recueils de nouvelles ; mais j'ai été déçue par ce roman. Je n'ai pas retrouvé cette lenteur sereine qui m'avait plu dans les autres œuvres de cet auteur, ni les longues descriptions exotiques ou pleines de non-dits, de signification.

Premier reproche que je ferais à ce roman : les dialogues sont beaucoup trop nombreux, on n'a pas vraiment accès à l'intériorité des personnages, j'ai eu l'impression que tout le roman était construit sur ce schéma : une réplique d'un personnage, une phrase de récit ou de micro-description pour nous donner une idée de la scène, genre didascalie, puis une nouvelle réplique, et ainsi de suite... si ça avait été comme ça sur 100 pages, je pense que ça aurait pu passer, mais 324 pages comme ça ! J'ai été lassée et ai mis 5 jours à lire ce livre.

L'héroïne, Arezou, n'a pas réussi à me toucher vraiment, j'ai trouvé que Zôya Pirzâd avait sur son personnage un regard béat, et comme je l'ai déjà dit plusieurs fois, je déteste quand les auteurs nous disent sans subtilité : "regarde comme elle est bien mon héroïne !", et là c'était "regarde, la pauvre est étouffée par sa famille et ne peut pas mener sa vie sentimentale comme elle l'entend !"... bon, j'exagère un peu, il y a bien des passages qui m'ont fait sourire et on sent quand même qu'il y a de la tendresse entre les trois femmes. Mais bon, je n'ai quand même pas été séduite.

Je m'attendais à autre chose, j'aurais aimé quelque chose de plus dépaysant, là certes on a une vision des moeurs en Iran dans les classes plutôt aisées de nos jours... mais c'est trop contemporain, trop occidentalisé. Cette histoire aurait pu être transposée en France, cela n'aurait pas changé énormément les choses, et dans ce cas-là ça aurait été une petite histoire sentimentale sans intérêt ; l'idylle entre Arezou et Zardjou est plus que prévisible, dès le début, et son évolution n'est pas non plus surprenante... pas vraiment désagréable à lire, mais pas enthousiasmant non plus.

J'ai lu quelques critiques de personnes déçues comme moi par ce roman, mais qui avaient beaucoup aimé un autre roman de Zoyâ Pirzâd, Un jour avant Pâques ; roman que je lirai donc tout de même (celui-là ou bien C'est moi qui éteins les lumières, premier roman de l'auteur), pour donner une autre chance à Zoyâ Pirzâd en tant que romancière ; en attendant, je vous conseille plutôt, si vous ne la connaissez pas, de vous tourner vers ses nouvelles (et en particulier vers le recueil Comme tous les après-midi, le premier que j'ai lu et aussi mon préféré).

Lundi 21 juin 2010

http://bouquins.cowblog.fr/images/livres/sumoquinepouvaitpas.jpgQuatrième de couverture : Sauvage, révolté, Jun promène ses quinze ans dans les rues de Tokyo, loin d'une famille dont il refuse de parler.
Sa rencontre avec un maître du sumo, qui décèle un "gros" en lui malgré son physique efflanqué, l'entraîne dans la pratique du plus mystérieux des arts martiaux. Avec lui, Jun découvre le monde insoupçonné de la force, de l'intelligence et de l'acceptation de soi.
Mais comment atteindre le zen lorsque l'on n'est que douleur et violence ? Comment devenir sumo quand on ne peut pas grossir ?
Derrière les nuages, il y a toujours un ciel...

Après Milarepa, Monsieur Ibrahim et les fleurs du Coran, Oscar et la dame rose, L'Enfant de Noé, Eric-Emmanuel Schmitt poursuit "le Cycle de l'Invisible" avec ce nouveau récit qui mêle enfance et spiritualité, nous conduisant ici à la source du bouddhisme zen.

Mon avis : Une petite lecture sympathique ; au début le côté vaniteux du personnage de Jun  m'agaçait, mais au fil du texte son septicisme m'a touchée et me l'a rendu plus proche. L'histoire est simple, il s'agit d'un récit initiatique qui fonctionne comme une parabole : à l'aide de son maître sumo, Shomintsu, notre héros qui est complètement perdu va apprendre à avoir confiance en lui, à agir avec détermination et persévérance, à méditer... le déclic qui s'opère quand il parvient enfin à méditer est resté un peu abstrait pour moi (je n'ai pas l'impresson que cela soit si facile, mais peut-être parce que je n'ai jamais réellement essayé ?), mais pourquoi pas... même si l'intrigue n'est pas vraiment développée, cette histoire m'a un peu fait penser à l'Alchimiste de Paulo Coelho, à l'Apiculteur de Maxence Fermine...

Je doute que cette lecture me marque vraiment, et j'aurais aimé un peu plus de poésie dans le style (que je suis difficile !), mais je ne suis pas déçue, je l'ai lue avec plaisir, en souriant, en un peu moins d'une heure. Comme les autres oeuvres du "Cycle de l'Invisible" (enfin du moins celles que je connais, je n'ai pas encore lu Milarepa ni L'Enfant de Noé), il s'agit d'une lecture-détente agréable et rapide (encore qu'Oscar et la dame rose me semble plus riche, plus construit) que je conseillerais plutôt à des enfants, ou à de jeunes adolescents, car un livre comme celui-ci initie un propos philosophique intéressant tout en restant très accessible. Remarque, ce livre m'a aussi permis d'apprendre l'existence d'une maladie génétique rare et aux symptômes étonnants.

Extrait :
"- On n'a pas besoin de religion pour vivre.
- De religion, peut-être pas. Mais de spiritualité, si.
- Foutaise ! Pipeau ! Du vent, du bruit ! Moi, je vis très bien sans ça.
- Ah oui ? Tu vis très bien, toi ?
Il marquait un point : mon angoisse empirait et je m'en rendais compte."

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"Il n'y a vraiment que deux choses qui puissent faire changer un être humain : un grand amour ou la lecture d'un grand livre." Paul Desalmand

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