♦ CHALLENGE ABC 2010, 14ème livre lu ♦
Quatrième de couverture : A la sortie du lycée Condorcet, Paul est terrassé par une boule de neige lancée par son idole, Dargelos, le coq du collège.
Trop faible ; il n'ira plus en classe, sa sœur le soignera dans leur chambre, navire imaginaire qui, tous les soirs, appareille pour des contrées lointaines. Ni Gérard qui aime Elisabeth, ni Agathe qui aime Paul n'empêcheront le frère et la sœur de s'adorer et se déchirer. Cette œuvre clef de Jean Cocteau est un conte fantastique, un roman de poète dont le récit devient chant. La chambre est un sanctuaire où l'on célèbre un culte à l'amour et à la mort.
Il y a une prêtresse, il y a un trésor, il y a des victimes sacrifiées. Il y a envoûtement et malédiction.
Mon avis : un livre au style étrange, différent de ce que j'ai eu l'occasion de lire ces derniers temps, et un style qui sort de l'ordinaire, c'est toujours une bouffée d'air que je respire à pleins poumons. J'ai lu ce petit livre en deux jours, seulement dans des moments volés, bus, tram, dans un parc en attendant mon train... il faut savoir que je n'ai pas (plus) du tout l'habitude de grapiller des moments de lecture, j'aime en général lire plusieurs heures d'affilée, lire un livre d'une seule traite.... lire dix minutes par-ci par-là, ce n'est pas mon truc, mais j'aimerais justement réapprendre à lire de cette façon, cela me serait bien utile. Là au début ce n'était pas du tout évident, car même si l'intrigue est plutôt facile à suivre (fans de livres d'action et rien d'autre, vous risquez de vous ennuyer), il faut plonger dans une atmosphère particulière, tout est très imagé, au début par exemple une petite bataille de collégiens est présentée comme une guerre d'importance mêlant des héros... on retrouve cette façon décalée, poétique de voir les choses dans tout le livre. Dans la première partie surtout (il y en a deux).
Suite à un accident qui semblait pourtant bénin, Paul se retrouve alité, et commence alors pour lui, son ami Gérard et sa sœur une vie oisive mais sans ennui qui va durer plusieurs années.... leur rythme de vie bizarre, leurs jeux qui consistent à s'extraire du monde, ce qu'ils considèrent comme leurs trésors, tout cela m'a fascinée. Les enfants sont livrés à eux-mêmes tout en étant entretenus par quelques adultes (dont on saura très peu de choses), et j'avouerai que j'ai envié leur situation ^^ ! Un autre personnage viendra les rejoindre dans "la chambre", et cette chambre, qu'ils essaieront toujours de reconstituer même quand ils la quitteront, est très importante, elle est considérée comme un temple. La prêtresse dont la quatrième de couverture parle, c'est Elisabeth, la soeur de Paul. Tous deux ont une relation unique, fusionnelle et ambigüe.
Dans la deuxième partie, nos personnages continuent leur vie immobile, même si quelques changements ont eu lieu.... dans cette partie, c'est la fin de leur âge d'or, de leur innocence, les personnages unis jusqu'ici vont se monter les uns contre les autres, des sentiments viennent tout compliquer, et finalement ce qui semblait être un conte éthéré tourne à la tragédie... la tendresse turbulente du début ne laissait pas présager une telle violence, et finalement je suis sortie de ce livre un peu étourdie et confuse. Deux ou trois descriptions m'ont paru un peu longues (enfin, elles ne sont pas tellement longues, mais vu le style parfois un peu étonnant, je les ai trouvées un peu trop abstraites - et souvenez-vous des circonstances de ma lecture, être pleinement concentrée n'était pas toujours aisé), mais en-dehors de cette minuscule réserve, j'ai trouvé ce livre magique, je me suis souvent arrêtée par plaisir, pour relire une phrase. Maintenant, j'aimerais bien voir le film...
Extraits :
"Il est de ces maisons, de ces existences qui stupéfieraient les personnes raisonnables. Elles ne comprendraient pas qu'un désordre qui semble à peine devoir continuer quinze jours puisse tenir plusieurs années. Or ces maisons, ces existences problématiques se maintiennent bel et bien, nombreuses, illégales, contre toute attente. Mais, où la raison n'aurait pas tort, c'est que si la force des choses est une force, elle les précipite vers la chute.
Les êtres singuliers et leurs actes asociaux sont le charme d'un monde pluriel qui les expulse. On s'angoisse de la vitesse acquise par le cyclone où respirent ces âmes tragiques et légères. Cela débute par des enfantillages ; on n'y voit d'abord que des jeux."
"Projets d'avenir, études, places, démarches ne les préoccupaient pas davantage que garder les moutons ne tente un chien de luxe."
En ce moment moi aussi je dois grapiller deux-trois moments parci par-là et je n'aime pas trop :/ Mais bon quand on n'a pas le choix.